Asmhri El Mahfoud et Ramou Hassan, chercheurs au centre des études historiques et environnementales de l’IRCAM ont finalement pu regagner le Maroc ce jeudi soir (6 janvier). «Ils sont rentrés sains et saufs» nous rassurait ce vendredi matin Ahmed Boukous, recteur de l’IRCAM, joint par téléphone. Les deux chercheurs amazighs avaient été placés «en garde à vue pour des questions routinières et sur l’objet de [leur] mission» ajoute également Ahmed Boukous qui parle de «dénouement heureux».
Mais la situation avait commencé à prendre une ampleur internationale. Le congrès mondial Amazigh (CMA) s’était même mêlé de la question. Dans un communiqué «d’indignation et de protestation» publié en début de semaine, le CMA parlait d’ «enlèvement» et d’ «actes odieux». L’ONG dénonçait également l’arrestation de deux autres activistes amazighs libyens pour «leur liberté d’esprit et leurs convictions politiques et leurs activités culturelles». Des interpellations considérées comme une «campagne orchestrée par le Colonel Kadhafi à l’encontre de l’amazighité et de ses symboles». L’Etat marocain été aussi appelé à «prendre ses responsabilités dans cette affaire qui touche la personnalité et la souveraineté marocaines.»
Ghadamès, une région sensible ?
Ce cri de cœur de l’ONG amazighe renseigne également sur les non-dits de ces interpellations. En effet, selon une source amazighe anonyme citée par Al Arabiya, les deux chercheurs marocains devaient, après la Tunisie, effectuer une partie de leurs recherches à Ghadamès, région dans l'ouest de la Libye, frontalière de l’Algérie et de la Tunisie. Une région notamment habitée par des Amazighs aux «droits spoliés par le régime libyen» qui est également accusé d’être «responsable d’assassinats ou de disparitions de plusieurs grandes personnalités amazighs». C’est dire que cette oasis située à 650 km de Tripoli est une région assez sensible.
D’où l’intérêt des services sécuritaires libyens sur l’objet des recherches menées par les deux Amazighs marocains. Des chercheurs qui ne sont pas les seuls à avoir maille à partir avec les autorités de Tripoli. Selon toujours les militants amazighs, un diplomate américain qui se serait rendu à Ghadamès pour s’enquérir de la situation des Amazighs de la région a été, lui, expulsé. Accusé d’espionnage par les responsables libyens.