«Avant, nous ne connaissions pas le Code du travail. […] Nous ne savions pas qu’il existe un salaire minimum ou même des conditions de travail décentes. Mais à présent, nous savons tout cela, nous sommes conscientes de nos droits et obligations, et cela change nos vies», témoigne à El Pais Fatima Hauhour, 30 ans, présidente de l'Association pour le développement des femmes rurales de Laghdira, un village situé près de Larache.
Des centaines d’autres femmes font partie des heureuses bénéficiaires d’un programme lancé en 2009 par Oxfam International. Ayant constaté les conditions marginales de travail de 20 000 femmes au nord du Maroc et leur méconnaissance de leurs droits parce que illettrées, l’ONG internationale avait décidé de les former, dans le but de rétablir les droits des femmes embauchées dans le secteur des fruits rouges. Le programme avait mobilisé un important investissement, avec l’apport de 1,5 million d’euros de l'Agence espagnole de coopération internationale pour le développement (AECID) entre juin 2010 et décembre 2014.
Progrès
En août 2014, Oxfam faisait déjà part de quelques résultats avec notamment le renforcement des droits et conditions de travail d’«une partie des travailleuses» et la création de leur propre association par 76 femmes. Et Fatima Hauhour est l’une d’elle.
Ces femmes devaient travailler très dur sans la moindre couverture maladie et sans aucune assurance. Et certaines ouvrières étaient souvent mineures. C’est le cas d’une jeune fille, aujourd’hui âgée de 17 ans, qui a commencé à faire ces travaux agricoles à l’âge de 7 ans. Grâce à l’initiative d’Oxfam, elle sait aujourd’hui lire et écrire.
«Nous nous sentons compétentes aujourd’hui. Avant, nous vivions entre la maison et le travail et ne pouvions parler à personne. Aujourd’hui, nous avons confiance en nous-mêmes et n’avons plus peur de parler», raconte Aswae 26 ans. Elle confie que désormais au travail, elle peut aisément s’expliquer en cas d’incompréhension.
Vu l’impact de son association dans le village, Fatima Hauhour avait même pensé à se présenter aux élections de septembre dernier, mais elle n’avait pas pu s’inscrire à temps. «Je suis fier de ce que je suis devenue», confie-t-elle.
Si les ouvrières agricoles du nord du royaume arrivent peu à peu à dépasser ces réalités, ce n’est pas encore le cas dans le Souss, zone agricole par excellence. Ces dernières années, de nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer la situation de ces femmes.