Grande-Bretagne: La prétendue sympathie de certains musulmans pour les jihadistes fait couler beaucoup d'encre

«1 Britannique musulman sur 5 éprouve de la sympathie pour les jihadistes», titre le quotidien britannique The Sun en une de son édition de lundi 23 novembre. Il s’agit des résultats d’un sondage réalisé par la même source sur un échantillon représentatif de 1003 personnes à travers le pays.

D’après les résultats, 5% ont «beaucoup» de sympathie pour «les jeunes qui vont combattre en Syrie», 14% en ont «un peu», tandis que 71% n’éprouvent aucune sympathie et 10% n’en savent rien. Les données montrent toutefois que plus de 2,7 millions de Britanniques musulmans sont tous modérés.

Articulant son commentaire autour des 19% de musulmans ayant de la «sympathie» pour les jeunes allant combattre en Syrie, The Sun a cherché à savoir ce qu’en pensent les responsables musulmans. ««Ceux qui ont de la sympathie pour ceux qui rejoignent la Syrie ont une compréhension déformée de ce qui se passe là-bas», a déclaré Omar Elhamdoon, de l’Association des musulmans de Grande-Bretagne, estimant que «tout niveau de soutien est préoccupant».

«Non, 1 Britannique musulman sur 5 n’a pas de sympathie pour les jihadistes»

L’info fait le tour des médias locaux ce lundi. Et si certains la reprennent simplement, criant parfois à la «honte» comme Express, d’autres en revanche critiquent la construction de ce sondage, ainsi que son interprétation par The Sun.

Selon ces derniers médias, le titre de The Sun peut pousser à croire -de prime abord- que 1 musulman sur 5 est d’accord avec Daesh. The Independent et Mirror notamment titrent : «Non, 1 Britannique musulman sur 5 n’a pas de sympathie pour les jihadistes».

Le premier journal s’attarde d’abord sur le volet technique du sondage, expliquant que la signification du mot «sympathie» est très large et ne signifie pas nécessairement qu’il s’agit d’un soutien total. De plus, le fait que les répondants avaient le choix entre «beaucoup» ou «un peu» de sympathie ne permettrait pas d’avoir un résultat tout à fait objectif. «Méthodologiquement, le choix modérée dans un sondage est beaucoup plus susceptibles d'être pris; cela gonfle le nombre de personnes ayant de la sympathie», estime The Independent qui se demande également si l’échantillon de 1000 personnes choisi par The Sun est réellement représentatif des Britanniques musulmans qui représentent 5% de la population nationale.

Mirror abonde dans le même sens. Les deux journaux estiment que la question posée aux sondés ne fait déjà pas mentions de «jihadistes», mais plutôt de «jeunes musulmans qui quittent le Royaume-Uni pour rejoindre les combattants en Syrie».Or, il y a plusieurs groupes de combattants en Syrie, notamment des groupes syriens opposants à Bachar el-Assad ou les Kurdes qui combattent Daesh. Et récemment, de nombreux jeunes britanniques partis lutté aux côtés de ces derniers ont été traités comme des héros à leur retour en Grande Bretagne.

De quoi attiser la haine 

«La une de The Sun donne l'impression que les atrocités des jihadistes sont soutenues par au moins une partie de la communauté musulmane», estime The Independant, soulignant que Sky News avait posé la même question dans un sondage réalisé auprès de Britanniques non musulmans en mars dernier et 14% disaient avoir une certaine sympathie pour les jeunes allant se battre en Syrie. Comment devrait-on l’interpréter.

Mirror regrette, pour sa part, que l’accent ne soit pas mis sur la grande majorité de musulmans britannique qui s’oppose (71%) au départ des jeunes pour la Syrie, alors qu’il sont de plus en plus nombreux à prendre position ouvertement.

Pour The Independent, la conséquence directe de ce genre de une, c’est la montée des actes islamophobes. Et depuis les attentats de Paris le 13 novembre dernier, plus 115 personnes ont été victimes de ces actes, principalement les jeunes femmes voilées. «Les personnes procédant à ces crimes de haine pourraient sans doute penser, pour une raison ou pour une autre, que le musulman lambda approuve les attentats de Paris», juge le quotidien.