La Belgique est devenue une plaque tournante des réseaux djihadistes européen. Si au lendemain des attentats de Paris, de nombreux médias français s’accordent à décerner ce titre à leur voisin, l’Histoire nous rappelle que le plat pays a en réalité été un point de chute de plusieurs groupes radicaux et ce depuis quatre décennies.
Dès la fin des années 70, en effet, des islamistes marocains de l’organisation interdite Chabiba islamiya avaient trouvé refuge en Belgique. C’est le cas notamment d’Abdelaziz Naâmani, présenté comme le cerveau présumé de l’assassinat du leader politique Omar Benjelloun en 1976.
Deux années plus tard, il lançait depuis la Belgique sa propre enseigne baptisée «Mouvement des moujhadines marocains». Il comptait parmi ses disciples un certain Abdelkader Belliraj. Grâce à sa proximité avec la communauté libanaise de confession chiite, le MMM avait réussi à envoyer de dizaines de jeunes Belgo-marocains pour suivre des entrainements militaires chez le Hezbollah. Bellliraj était d’ailleurs parmi les recrues.
Al Qaida a puisé dans le vivier belge
Vers la moitié des années 90, c’est l'organisation Al Qaida qui vole la vedette aux autres groupes djihadistes. Profitant de ses "succès" en Afghanistan, elle a non seulement réussi à récupérer de nombreux islamistes qui avaient combattu les forces soviétiques mais a pu convaincre une nouvelle génération d’islamistes de prêter allégeance à Oussama Ben Laden. Les islamistes de Belgique avaient suivi cette évolution en créant avec les Marocains le «Groupe islamique combattant marocain». Ils étaient d'ailleurs la cheville ouvrière du GISM en Belgique bien sûr mais aussi en Espagne, en Bosnie et au Maroc.
Le début du 21ème siècle a connu le baptême de feu du GISM. Rabat et Madrid accusent ce groupe terroriste d’avoir planifié les attentats du 16 mai 2003 à Casablanca et du 11 mars 2004 à Madrid. La justice belge a ensuite pris le relais en condamnant des membres du réseau à des peines d’emprisonnement pour activités terroristes, tel El Houcine El Haski et Abdelkader Hakimi (condamnés en février 2006 par un tribunal à Bruxelles à sept ans de prison chacun) et Mustapha Lanouni à dix ans de prison.
Daesh marche sur les traces d’Al Qaida
L’intervention militaire américaine en Afghanistan et ensuite en Irak a réduit les actions d’Al Qaida. Son satellite le GISM n’était guère mieux loti, subissant plusieurs démantèlements de cellules aussi bien au Maroc qu’en Espagne ou en Belgique.
Ce déclin des deux organisations allait vite être comblé par l’apparition de «l’Etat islamique» en Syrie et en Irak et l’émergence d’une nouvelle génération de jeunes djihadistes Belgo-marocains, plus déterminés, mieux entrainés que ceux d’Al Qaida et capables de déjouer les contrôles des services de renseignements européens. En témoigne les attentats de Paris du 13 novembre et le projet avorté d’Ayoub El Khazani ciblant les passagers d’un train reliant Paris à Bruxelles.
Ces quatre décennies de présence djihadite en Belgique renseignent sur un phénomène beaucoup plus ancré que ne laisse penser les dernières annonces suite aux attentats de Paris. Les organisations terroristes rsiquent de continuer à profiter du travail initié par Abdelaziz Naâmani.