«J’ai appelé le ministre du Tourisme [Lahcen Haddad, ndlr] pour lui parler de l’expulsion de ces familles. Il m’a dit que ce n’est pas mon affaire, que ça ne me regarde pas», confie à Yabiladi avec un ton empreint de déception, le maire d’Agadir, Tariq Kabbage.
L’élu s’inquiète de la situation des 22 familles ménacées d'expulsion sous ordre de la justice pour la réalisation d’un projet touristique porté par la Société marocaine d’ingénierie touristique (SMIT), un établissement sous-tutelle du ministère du Tourisme. Et pour cause, aucune alternative n’a été proposée par la société et la justice n’en a exigée aucune, nous avait expliqué le maire d'Agadir. En d’autres termes, les familles concernées se retrouveront tout simplement à la rue.
«Ça me concerne»
«Et ça me concerne. D’abord en tant que maire, parce que cette localité est sous ma responsabilité, et même en tant qu’élu», revendique M. Kabbage qui suivant de près le dossier, rend visite aux familles de Tamaouanza. C’est d’ailleurs lui qui a évoqué leur cas au Conseil de la ville qui s’est tenu lundi 9 mars. Il a également fait part aux élus de son entretien avec le ministre du Tourisme. «Il [Lahcen Haddad, ndlr] s’en fout complètement du sort des habitants. C’est très grave qu’un ministre de l’actuel gouvernement se comporte de cette façon», regrette le maire. «Le parti au pouvoir s’appelle Justice et Développement, mais où est la justice dans cette affaire quand un ministre parle ainsi», se demande-t-il.
Pourtant, la présence de ces familles dans la localité remonte à 1895, lorsque leurs aïeux avaient acheté le terrain, une époque où le titre foncier n'existait pas. Et selon le maire, plusieurs documents officiels de la ville prouvent l'existence légale de ce village. «C’est la politique du ministère du Tourisme qui consiste à expulser les gens pour leurs projets», lance M. Kabbage. Et de préciser : «Ce sont des projets immobiliers et non touristiques. Comment expliquer qu’on n’indemnise pas les habitants s’il s’agit d’un vrai projet avec de grands hôtels, commerces, etc ?».
Lahcen Haddad persiste
Sans se prononcer sur la nature du projet de la SMIT, le ministre du Tourisme, joint par Yabiladi, se montre plutôt compatissant à la situation des familles de Tamaouanza. «Je comprends la souffrance de ces personnes. S’ils ont besoin d’aide, je suis disposé à les rencontrer», confie-t-il. Lahcen Haddad reconnait les propos tenus dans son échange avec le maire d'Agadir. «Ce n’est pas l’affaire de Tariq Kabbage. Ça ne le regarde pas, car Tamaouanza n'est pas sous tutelle de la mairie», répète-t-il. Et d'ajouter: «Je ne suis pas d’accord qu’il utilise ça pour des raisons électorales et politiques».
Au-delà de cette joute entre politiques, la lutte au niveau de la justice continue. L'avocat des familles, Me Aouzine Hassan, fait des pieds et des mains pour éviter leur expulsion. Il a déjà fait les démarches pour un pourvoi en cassation et compte émettre une demande de délai de grâce auprès du président du tribunal.