Après plusieurs affaires avec la justice, Adil Charkaoui refait la Une des médias au Canada. Ce professeur marocain qui donne des cours aux jeunes musulmans est à nouveau accusé de vouloir les radicaliser. Selon The Star, tout est parti du voyage, en janvier dernier, de six jeunes Canadiens, âgés entre 18 et 19 ans, vers la Turquie pour rejoindre l’Etat Islamique en Syrie. Parmi eux, quatre élèves au Montreal’s College de Maisonneuve. Mais c’est un certain Bilel Zouaida, qui n’a assisté qu’à deux cours de Charkaoui, qui est à l’origine des accusations visant le professeur.
Selon les médias canadiens, Charkaoui dirige un groupe de jeunes qui se retrouvent les week-end pour des cours d’arabe, de Coran, et «notions de base» de l'Islam. Après avoir appris que Zouaida avait assisté, l’automne passé, à deux cours du professeur, les écoles ont suspendu leurs contrats de location qui les lient avec le groupe de jeunes. Une décision difficile à accepter pour le Marocain, qui était dans le collimateur des autorités depuis 2003. Charkaoui était à l’époque accusé d’être un agent secret d’Al Qaida et d’avoir bénéficié des entrainements du groupe terroriste en Afghanistan. Il devait même être expulsé avant que les autorités ne fassent marche arrière.
Zouaida a menti à la police !
Pourtant, le professeur semble n’avoir aucun rapport avec le voyage d’un de ses élèves. En effet, Zouaida montrait des signes de radicalisation chez lui, ce qui a poussé son père à confisquer son passeport. Mais le jeune homme, déterminé, a déclaré à la police qu’il a perdu son passeport afin d’en obtenir un autre. La police mordra à l’hameçon et il obtiendra un nouveau passeport pour rejoindre la Turquie.
Charkaoui, lui, se demande comment le SCRS (Service canadien du renseignement de sécurité) et la GRC (Gendarmerie Royale du Canada) ont pu être trompés «si facilement». «J’étais vraiment surpris», a-t-il confié vendredi au cours d’un point de presse.
Le cas Zouaida n’est pas le seul qui a suscité des interrogations. Une jeune étudiante, Shayma Sentoussi, qui n’a aucun rapport avec Charkaoui, est partie également en Turquie après avoir vendu sa toge à 300 dollars canadiens. Mohamed Rifaat, un jeune Montréalais qui fréquentait le groupe de jeunes enseignés par Charkaoui et qui est apparu avec lui dans des photos, a également rejoint la Syrie, d'après LaPresse.
Charkaoui choqué par la «logique tordue» des accusateurs
Acculé, le professeur estime être une cible facile. Il déplore la réaction des deux écoles qui ont décidé d’annuler leur contrat de location pour les cours du week-end. «Je suis stupéfait par la logique tordue des porte-parole des deux (collèges) et les pseudo-experts qui blâment la radicalisation des jeunes pour ce qui s'est passé». Charkaoui, qui compte poursuivre les deux écoles, explique qu’il encourage ses élèves à s’intégrer et à aller à l'école tout en les aidant à calmer leurs frustrations provoquées par «l'islamophobie».
Vendredi, le premier ministre canadien a demandé à adopter des lois plus rigoureuses pour contrer la menace extrémiste. Un discours qui ne colle pas avec la vision du professeur marocain. «Je pense que pour lutter contre la radicalisation et le terrorisme, nous n’avons pas seulement besoin des lois. Nous avons besoin de la collaboration des communautés, des imams, des écoles, de toute la société», estime-t-il. «Ce ne est pas seulement avec des lois très dures que nous pouvons lutter contre la radicalisation. La radicalisation est une conséquence, pas une cause».
Adil Charkaoui sur Radio Canada