Le 23 août 2014, le roi Mohammed VI ordonnait l’ouverture d’une enquête sur le projet résidentiel Badès à Al Hoceima réalisé par la Compagnie générale immobilière, une filiale de la CDG. Le même jour, un communiqué des départements de l’Intérieur et des Finances, dirigés par deux anciens walis, respectivement de Tanger et Casablanca, faisait état de «défaillances techniques dans la réalisation du projet, objet des doléances des bénéficiaires».
Les prévenus ne sont pas logés à la même enseigne
Trois semaines après l’intervention royale, des sources médiatiques avancent que les investigations menées par une équipe de la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ) se dirigeraient vers une mise en cause de quelques petits responsables. Parmi eux, M.B, la directrice de tout le projet. Elle assure également le suivi de la construction d’un hôtel, toujours à Al Hoceima. Apparemment, la dame n’aurait pas supporté les onze heures d’interrogatoire et se serait évanouie.
Quant aux grosses pointures, ils ont eu droit à un autre traitement. Ils sont auditionnés, non pas par la BNPJ, mais par une commission conjointe des ministères de l’Intérieur et des Finances. Sur la liste des chanceux, figurent l’actuel directeur général de la CGI, Mohamed Ali Ghannam, le directeur des opérations de la société publique sur l’axe Rabat-Nord et le directeur général délégué chargé du pôle des constructions. Ces trois hauts responsables ont dû répondre à des questions sur la conformité des résidences livrées aux propriétaires (dont plusieurs MRE) avec les cahiers de charges.
Ouvrir la boîte de Pandore
Avant que n’éclate cette affaire, les responsables de la CGI, dans une volonté d’étouffer le scandale, ont proposé aux victimes de les dédommager mais selon un prix bien inférieur à celui du marché. Une offre rejetée par les propriétaires qui ont saisi la présence du roi Mohammed VI à Al Hoceima pour le contacter et solliciter son intervention.
L’onde de choc de Madinat Badès aurait atteint le quartier Ghandi à Casablanca où certains cadres de la CGI, filiale de la CDG, auraient bénéficié de villas à des tarifs défiant toute concurrence. Des cadeaux pour qu’ils ferment les yeux sur les nombreuses irrégularités qu’a connues le projet.
Cette affaire a valeur de test pour la justice marocaine : Aura-t-elle assez d’audace pour aller jusqu’au bout et ouvrir la boîte de Pandore ou se contentera-t-elle, comme d’habitude, de quelques boucs émissaires en vue de clore le dossier ? Le cas de l'effondrement des trois immeubles au quartier Bourgogne à Casablanca est malheureusement un parfait exemple de cette politique.