Les dizaines de Subsahariens de toutes nationalités qui ont manifesté ce matin, mardi 2 septembre, à Rabat devant les ambassades camerounaise, malienne, sénégalaise, guinéenne et nigériane ont obtenu une première réponse de leurs représentants diplomatiques. Les ambassadeurs des pays subsahariens tiendront une réunion exceptionnelle demain suite au meurtre d’un Sénégalais, vendredi soir, à Boukhalef, à Tanger, à la disparition d’un Guinéen et à l’arrestation de près de 33 Subsahariens, dont 27 sont sur le point d’être expulsés par avion.
«Trois Marocains ont frappé un Subsaharien, vendredi soir. Nous l’avons fait amener à l’hôpital par un ami. C’est le commencement des violences qui ont mené à la mort de Charles Ndour quelques heures plus tard», raconte Pierre, Camerounais vivant à Boukhalef qui a fait le déplacement à Rabat pour la manifestation. «Nous savons que ce sont trois Marocains du quartier qui incitent les gens du quartier à se mobiliser pour agresser les migrants. La police n’intervient pas, elle les laisse faire. Quand j’ai moi-même été agressée par l’un d’eux il y a deux semaines, il y avait un commissaire à côté de moi qui n’a rien fait», raconte Héléna Maleno, membre de l’association Caminando Fronteras à Tanger.
«Diplomates complices»
Quelques dizaines de Subsahariens se sont donc réunis devant l’ambassade du Cameroun, tôt ce matin, pour réclamer la protection et l’intervention de l’ambassadeur, Mouhamadou Youssifou. Interpellé vivement à son arrivée aux cris de «diplomates complices», il a entre autres assuré à la petite foule qu’il «n’y a pas de honte à rentrer. Nous avions organisé un programme de retour volontaire, mais personne n’est venu.» «Ce n’est pas la question !» «Pourquoi faire ?», ont lancé quelques manifestants. Malgré l’incompréhension réciproque évidente, l’ambassadeur a tout de même accepté d’accueillir une petite délégation à laquelle il a annoncé qu’il se rencontrerait les autres ambassadeurs dès demain lors d’une réunion exceptionnelle.
La foule s’est déplacée ensuite vers l’ambassade du Mali où l’ambassadeur a confirmé les dires de Mouhamadou Youssifou et accueilli également une délégation. En rejoignant, l’ambassade du Sénégal, la colère était palpable chez certains manifestants qui discutaient de l’opportunité de se venger sur les nombreux Marocains installés au Cameroun. Quelques manifestants interpelaient également les passants marocains sur leur passage aux cris de «Halte au massacre !» et en brandissant les photos du défunt, mais toute la manifestation est restée pacifique.
Le Sénégal ferme ses portes
A leur arrivée, l’ambassade du Sénégal était fermée et protégée par un cordon de représentants des forces de l’ordre. Des membres de l’ambassade sont seulement sortis pour indiquer aux manifestants qu’il fallait faire une demande préalable avant de rencontrer l’ambassadeur. Les manifestants se sont donc éloignés furieux. La décision et la frilosité de l’ambassadeur sénégalais peut s’expliquer par les échauffourées qui avait eu lieu en mai 2013 au sein même de l’ambassade dans le cadre d’une manifestation du même ordre où un groupe de Sénégalais suite aux expulsions récurrentes de Sénégalais par le Maroc.
La manifestation s’est ensuite poursuivie devant l’ambassade de Guinée, puis du Nigéria. A chaque fois une petite délégation a été entendue par l’ambassadeur. «Ils vont voir si nous pourrons être représentés lors de la réunion de demain», indique Camara Laye, coordinateur du Conseil des migrants subsahariens au Maroc.