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Tribune

Casablanca : Ce ne sont pas seulement des immeubles qui s’effondrent !

Sommes-nous un peuple trop tolérant au point de tolérer l’humiliation des siens, au point d’accepter le viol de ses enfants, leur mort sous les décombres ? Ou bien c’est parce qu’on a la mémoire d’un poisson rouge ou que tout simplement on a tellement de malheurs et drames qui se succèdent, qu’un malheur nous fait oublier l’autre … Mais finalement un malheur, tout comme la joie, ne vient jamais seul.

Publié
Trois immeubles se sont effondrés dans le quartier Bourgogne à Casablanca / Ph. EPA - MAXPPP
Temps de lecture: 3'

Le drame de Bourgogne, effondrement de trois immeubles, 23 morts, une cinquantaine de blessés. Que des victimes restent encore sous les décombre depuis l’effondrement il y a 4 jours est inacceptable, que l’opération de sauvetage se transforme en une simple opération d’extraction de cadavres est juste intolérable… Est-ce une opération si compliquée que cela ou est-ce dû au manque de compétences, professionnalisme, moyens et expérience ? Sommes-nous équipés si un drame ou une catastrophe plus importante nous frappe ?

Où est le hajjam ?

La lenteur de l’opération de sauvetage nous a fait momentanément oublier des visages et des noms qui normalement devaient être sur les lieux, parler de ce drame, se justifier, s’exprimer, s’excuser ou ne serait-ce que montrer un peu d’empathie envers les victimes, leurs familles, leurs voisins.

A part le Roi qui s’est rendu sur les lieux du drame et qui a visité les victimes, le chef du gouvernement ne s’est même pas manifesté. Pareil pour les ministres de l’Intérieur,  de la Justice (sauf celui de l’habitat qui est sorti de son silence deux jours après),  les élus surtout ceux qui ont fait rêver les habitants de cet arrondissement avec leurs youyous… Silence radio !

Ni responsable, et encore moins coupable

On s’est habitué dans toutes ces catastrophes, aucun responsable n’est tenu responsable. Ils disparaissent tous comme le sel dans l’eau, misant sur cette incroyable capacité de tolérance des Marocains qui prient pour que le prochain drame s’éloigne d’eux et ainsi oublier celui qu’ils vivent dans la douleur.

Je n’exige même plus la démission d’un de ces responsables comme on peut le voir dans d’autres contrées. Car dans un pays qui se respecte, l’Etat respecte d’abord et avant tout la vie de ses citoyens. Chez nous, comme toujours, chacun se renvoi la balle dans le camp de l’autre, personne n’est responsable. On désignera finalement un coupable au dernier niveau de la chaîne, le maillon faible.

Indignation à géométrie variable

Et puis, une pensée à ces militants. Il y a deux semaines, ils se sont révoltés contre un mot venant du chef du gouvernement. Bravo ! Mais personne ne s’est soulevé suite à ce drame qui a fait beaucoup trop de morts. Or nous savons tous l’origine et les coupables.

La maladresse du chef du gouvernement qui ne sait pas choisir ses mots semble être plus révoltante que l’impunité, le mépris, ces âmes qu’on perd à cause de la corruption, le manque de compétence, la négligence. Pourtant ces maux prennent chaque jour une nouvelle forme. Une fois un effondrement, une autre un viol, une agression, un meurtre, un vol. Alors quoi ? Faut-il politiser un drame pour que les militants militent ?

Comme un éternel recommencement 

Rappelons qu’en 2012, Casablanca a connu le même drame qui a suscité la mise en place d’un plan «d’urgence». Le Conseil de la ville avait tenu, une session extraordinaire consacrée à l'examen de la problématique qualifiée de grave et urgente, selon les termes des mêmes responsables. 3 000 des habitations menaçant ruine ont été recensées, ce qui représente quelque 72 000 ménages. Le ministère de l'Habitat, de l'urbanisme et de la politique de la ville, à l’époque a identifié les sources de financement et a déterminé les mécanismes de l’intervention en accord avec le ministère de l'Intérieur et la direction générale des collectivités locales afin de mettre en place le dit «plan d’urgence»… Deux ans après, on vit le même drame avec un bilan encore plus lourd que celui d’avant.

Alors que dire, que faire ? Sommes-nous condamnés à la fatalité ? Dans ce cas, contentons-nous de dire : au drame suivant qui nous mettra en colère, et qui aussi vite, disparaitra dans l’air ! Ce ne sont pas que des immeubles qui s’effondrent, des vies détruites, un quartier défiguré, c’est l’avenir de tout un pays que l’on condamne par notre incapacité à nous révolter. 

Tribune

Loubna Karroum
Doctorante en économie
l'histoire
Auteur : participant
Date : le 18 juillet 2014 à 08h45
Article bien écrit.
J'ai signalé sur un autre forum , que ce genre d'accident se reproduira de plus en plus.
Attendez vous à ressortir votre article dans quelques semaines ou mois.


L'âge de pierre
Auteur : moden
Date : le 16 juillet 2014 à 20h28
À mon grand regret, je constate que le Maroc vie encore à l'âge de pierre
Puis qui a donné l'autorisation pour cette élévation anarchique et hors norme ?
pour quoi ces vendeurs de sommeils cupides s'amusent a modifier les plans pour construire des cages à poules sans se soucier des ça séquences et foutre l'a vie d'autrui en l'air ?
Pourquoi les secouristes manquent de tout, de vrais formations et vrais moyens logistiques pour intervenir efficacement et rapidement en cas de catastrophe comme celle-ci ? Et si c,était Twine Center qui serait écroulé combien de victimes on aurait déplorées ?
des mots justes , dans un pays où la demagogie bat son plien ...
Auteur : houssni39
Date : le 16 juillet 2014 à 05h58
un très bon article , j'aime les marocains quand ils sont claires et non démagogues ; bravo ! enfin une marocaine qui nous donne un peu de fierté ... on en a vraiment besoin de temps en temps ...
Dernière modification le 16/07/2014 05:59
attention
Auteur : Tarik66
Date : le 16 juillet 2014 à 01h33
En cas de guerre de bombardement , sauve qui peut personne ne viendra vous aider si un obus ne vous tue pas vous mourez d'aspyxie
Militants ?
Auteur : Abdullah Abaakil
Date : le 15 juillet 2014 à 22h26
Mais de quels militants parle-t-on ?
De Ali Anouzla puni pour avoir été le whistle blower du #DanielGate ?
De Mouad Belghouate qui purge sa troisième peine de prison pour avoir dénoncé inlassablement la corruption largement à l'origine du drame de Bourgogne et bien d'autres ?
Et tous les autres qui font l'objet de harcèlement policier permanent
Il serait temps que les citoyens se fassent massivement militants à leur tour, plutôt que de se réfugier derrière une indignation légitime en laissant les autres en première ligne payer le prix leur bonne conscience.
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