Yabiladi : Lorsque l'on est élu Marocain en Belgique en particulier et quand comme vous ont est d'abord échevin de Molenbeek, commune de Bruxelles qui compte une forte proportion de Marocains, n'est-on pas toujours un peu un représentant de cette communauté ?
Ahmed El Khannouss : Les élus belgo-marocains ne sont en aucun cas les représentants de la communauté marocaine, nous sommes avant tous des élus de la ville, de la commune, de la région... Je ne me considère pas comme l'élu des Marocains mais il est vrai que nous avons une sensibilité particulière aux problématiques propres à cette communauté. Il faut reconnaître que nous bénéficions du vote ethnique.
Le vote ethnique existe donc en Belgique ?
Il y a un vote ethnique parmi les Marocains ; il s'agit simplement d'un vote de niche qui n'a rien de propre aux Marocains. Il peut se baser sur une référent ethnique, religieux, corporatiste... Il est une réalité du microcosme électoral. Quand nous formons des listes, comme il m'est arrivé de le faire, nous étudions la situation et nous choisissons les personnes qui y figureront en fonction de ces niches, des voix qu'ils peuvent rassembler autour de leur personne ; en plus bien sûr de valeurs communes et de s'accorder sur le programme.
A quelle tendance politique s'attache le vote des Marocains ?
Il y a une tradition qui veut que les Marocains donnent leur voix au PS. C'est vrai que le parti a gagné plusieurs combats pour les ouvriers et les classes les plus fragiles de la société dont faisaient partis les immigrés marocains, par le passé, mais le PS considère aujourd'hui que le vote des Marocains est un vote captif, selon la terminologie de leurs analystes politiques. Il a tort, avec la seconde et la troisième génération, la communauté marocaine s'émancipe.
Je sors d'une réunion ou quelqu'un a comparé la communauté marocaine à la communauté turque liée comme les doigts d'une main et qui agit comme un seul homme. Au contraire, notre communauté possède un esprit critique qui lui évite les manipulations électorales et les conditionnement, même s'il y a toujours une partie d'entre eux qui vote pour une personne en raison du sentiment de proximité.
La région Bruxelles capitale est aujourd'hui gouvernée par une coalition de gauche pour laquelle votent traditionnellement les Marocains. Y a-t-il un sentiment de défiance équivalent à ce que l'on trouvait aux Pays-Bas dans la communauté marocaine avant les élections municipales vis à vis des socialistes ?
Sous le mandat de l'actuel gouvernement fédéral à dominance socialiste des mesures ont été prises pour réduire le regroupement familial. Des décisions européennes qui visent à réguler le marché de l'emploi sont défavorables aux chômeurs belges de longue durée, mais je ne pense pas que ces décisions affectent le vote des Marocains et le résultat des élections, sinon de façon très marginale.
Cette année, la Belgique a fêté en grande pompe les 50 ans d'immigration marocaine en Belgique. Un nouvel accord de sécurité sociale a été signé entre le Maroc et la Belgique. Les Belgo-marocains ont plutôt de bonnes raisons d'être satisfaits de renouveler leur confiance à leurs gouvernants par ces élections ?
Les 50 ans de l'immigration marocaine en Belgique étaient l'occasion de couronner la présence des Marocains en Belgique, de réaliser une communication positive de cette communauté. Malheureusement, l'évènement a été totalement récupéré par le parti socialiste a son seul profit politique.
L'accord pour la sécurité sociale est positif, c'est certain, il permettra à ceux qui ont financé la sécurité sociale belge de continuer à en bénéficier quand ils décident de rentrer passer leur retraite au Maroc. Ceci étant, il ne faut pas se leurrer, comme en France, cette préoccupation ne peut être dissociée des économies qu'elle va engendrer pour l'Etat belge. Il est beaucoup moins cher de rembourser des frais de santé réalisés au Maroc qu'en Belgique.