Johan De Ryck, journaliste de la Vlaamse Radio- en Televisieomroeporganisatie (VRT), qui diffuse ses programmes en flamand, vient de s’attirer les foudres des musulmans. L’homme, qui officie depuis plusieurs années, entre minuit et quatre heures du matin, sur la Radio 1 du groupe, évoquait les codes de conduites en Arabie saoudite, où la princesse Astrid effectue une visite de travail depuis dimanche, lorsqu’il s’est permis un petit commentaire jugé déplacé.
«L’Arabie saoudite affiche l'une des formes les plus archaïques de l'islam», a-t-il lâché à l'antenne vers 2 h du matin, alors qu’il présentait un bulletin d’information.
L'abaya qui dérange
Avant de prononcer ces propos controversés, le journaliste, présent à Ryad, expliquait à ses auditeurs que la princesse, sœur du roi Philippe, était la seule femme de la mission économique belge autorisée à ne pas porter le foulard ou la «abaya», la fameuse robe noire traditionnelle, portée généralement au-dessus des vêtements dans plusieurs pays du Golfe. Toutes les autres femmes belges de la mission ont dû enfiler cette dernière, avant leur descente d'avion.
Aussi, lors d’une conférence, toutes les femmes ont été placées derrière des paravents en bois, excepté la princesse Astrid et Céline Frémault ministre bruxelloise de l'Economie, souligne la presse belge.
Rappel à l’ordre
Quelques heures après avoir déclenché la polémique, Johan De Ryck a été rappelé à l’ordre par son rédacteur en chef Griet De Craene. Celui-ci a estimé que le choix du mot «archaïque» (achterlijk) était une faute déontologique et a donc convoqué son journaliste. «Il a reconnu qu'un tel choix de mot n'était pas adapté à un journal parlé de la VRT, que ça n'aurait pas dû se produire et que cela ne se répéterait plus», a expliqué plus tard la direction de la chaîne publique dans un communiqué publié lundi soir.
D’autres journalistes du pays ont été plus virulents dans leur propos à l’égard de cette mission, comprenant notamment le ministre belge des Affaires étrangères Didier Reynders et quelque 300 hommes d'affaires provenant de 172 entreprises. Philippe Paquet, journaliste de La Libre Belgique, en fait partie.
«L’argent n’a pas de formes»
Dans un édito titré «L’argent n’a pas de formes en Arabie saoudite», celui qui est également sinologue et docteur en histoire de l'art et archéologie, écrit : «Libre à chacun, certes, de se déguiser en pingouin pour aller vendre des congélateurs en Alaska. Et, en ces temps de crise, on ne songerait pas à reprocher à nos entreprises de chercher à signer des contrats dans un de ces rares pays où l’on paie encore rubis sur l’ongle».
«Faut-il pour autant cautionner les "traditions" rétrogrades d’un Etat qui compte par ailleurs parmi les plus grands violateurs des droits de l’homme - et de la femme en l’occurrence - au monde ? Faut-il a fortiori s’y soumettre dans des espaces privés (les salons d’un grand hôtel international) ? Vendre, ou espérer vendre, à ce prix-là, n’est-ce pas abdiquer toute dignité, et d’abord sa dignité de femme ?», s’interroge-t-il par la suite.