Certains promoteurs immobiliers réclament parfois «50 000 dirhams, 100 000 dirhams et même 200 000 dirhams de dessous de table sur des appartements dont le prix réglementaire n’est que de 250 000 dirhams», révèle une enquête de l’hebdomadaire économique La Vie Eco et relayée dans son édition du vendredi 14 mars. En effet, ce prix conventionnel est valable jusqu’en 2020.
D’après la même source, la pratique est surtout répandue chez les petites et moyennes structures. Sur le boulevard Taddart à Casablanca, à titre d’exemple, une agence dit commercialiser des logements économiques de 45 m2 à des prix allant de 340 000 à 380 000 dirhams. Une des commerciales a clairement reconnu «qu’une partie du prix, de 90 000 dirhams à 130 000 dirhams, est non déclarée», indique l’enquête. Mais un calcul arithmétique rapide montre bien que le prix déclaré est de 250 000 dirhams. De plus, le client intéressé devrait fournir, pour la réservation, un certificat de non propriété, demandé dans des programmes de logements sociaux. Conclusion : cette agence trompe le client et fait son business sur le dos de ce dernier.
1 opérateur sur 4 abuse des clients
Dans d’autres quartiers de la capitale économique, notamment Sidi Maârouf et Nouaceur, ces abus vont de 50 000 à 100 000 dirhams. Mais ici, le surplus diminue selon que l’on monte en étages. A Hay Errahma, très prisé en ce moment, les opérateurs procèdent autrement pour obtenir un petit surplus sur les 250 000 dirhams conventionnels. Ils jouent sur les clients qui se désistent. A tous les intéressés, ils font payer une réservation, qui sera ensuite revendue au cas où le client renonce à l’achat de l’appartement. Selon un vigile habitué à jouer l’intermédiaire dans ce genre de magouille, «les plus gourmands demandent jusqu’à 80 000 dirhams mais plus raisonnablement, il faut entre 10 000 et 20 000 dirhams pour racheter la réservation de clients qui se désistent».
La pratique est très connue de l’Union nationale des petits promoteurs immobiliers (UNPPI). Selon cette organisation, «un opérateur de petite taille sur 4, dans le social, renchérit illicitement le prix du logement». Et pour cause, une grande partie de ces promoteurs obtiendrait leur foncier au noir, dit-on.
Plusieurs villes concernées
Selon la Fédération nationale des associations de consommateurs (FNAC), plusieurs villes du royaume sont concernées par le fléau. Les promoteurs réclameraient 50 000 à 70 000 dirhams en plus du prix réglementaire. A Oujda, ils montent : 80 000 à 100 000 dirhams de majorations. Mais visiblement les abus sur les logements sociaux ne sont pas totalement absents chez les grands promoteurs. «Nous continuons de recevoir des plaintes d’acquéreurs de logements sociaux à Casablanca au sein des grands promoteurs avec des pots de vin réclamés par les commerciaux de 5 000 à 10 000 dirhams», confie à La Vie Eco Ouadie Madih, secrétaire générale de la FNAC.
Par ailleurs, la pratique ne date pas d’aujourd’hui. En 2008, un citoyen a filmé une opération de vente d’un logement social illustrant la pratique illicite. La vidéo est toujours disponible sur Youtube.
Pourtant, les promoteurs immobiliers au Maroc bénéficient d’exonérations fiscales sur les logements sociaux. Après l’entrée en vigueur de la Loi de finances 2013, qui a revue à la hausse les taxes sur les matériaux de construction, les professionnels craignaient le désistement des opérateurs dédiés aux logements sociaux, en raison de l’alourdissement de leur coût de production. Mais ceux-ci ont visiblement trouvé le moyen de se faire des rentrées d’argent, au détriment du citoyen, car il est toujours bon de rappeler que le logement social est destiné aux moins nantis.