«Le tribunal militaire ne jugera plus que les crimes commis par les militaires eux-mêmes dans l’exercice de leurs fonctions», souligne Hicham Rachidi, secrétaire général du GADEM. Le Maroc réduit drastiquement le champ d’action de cette justice d’exception. Hier, jeudi 13 mars, le Conseil de gouvernement a adopté le projet de loi n°108-13 relatif à la justice militaire, présenté par le ministre chargé de l'administration de la Défense nationale, même si aucun ministre n’avait pu lire le texte auparavant et qu’il n’a pas encore été rendu public.
«C’est une grande avancée, il faut le reconnaître ; c’est tout à fait extraordinaire», souligne Hicham Rachidi car la nouvelle loi soustrait de nombreuses infractions, crimes et délit à la justice militaire, qui est une justice d’exception, pour les remettre au droit commun dont la loi est établie, dans un système démocratique, pour tous et par le peuple.
Le rapport du CNDH concrétisé
Cette loi est la traduction concrète du rapport élaboré parle Conseil National marocain des Droits de l’Homme (CNDH) pour le roi, début mars, sur la réforme du tribunal militaire. «Le rapport préconise notamment que les civils ne soient plus poursuivis devant le tribunal militaire et que la compétence de ce dernier soit rétrécie», indiquait un communiqué officiel du palais royal dans lequel le roi se félicitait «de l'esprit de la démarche et de la teneur des rapports thématiques».
Le rapport sur la réforme de la justice militaire faisait suite, alors, à la condamnation en février 2013 de 24 Sahraouis impliqués dans les affrontements de Gdim Izik entre manifestants indépendantistes et forces de l’ordre marocaines. Leur jugement par la justice militaire avait été dénoncé par de nombreuses associations des droits de l’homme.
Plus récemment, Mamadou Diarra, jeune migrant subsaharien accusé du meurtre d’un militaire, au poste frontière Farkhana, entre Melilla et le Maroc, le 10 juillet 2012, avait vu repoussé sans explication la première audience de son procès devant le tribunal militaire de Rabat. Même si la loi est rapidement adoptée par la Chambre des représentants, son procès ne sera sans doute pas renvoyé vers la justice civile. «La loi n’aura pas d’effet rétroactif et ne devraient donc pas s’appliquer aux civils qui sont aujourd’hui poursuivi devant la justice militaire. Il existerait deux façons, pour eux d’y échapper : soit être condamnés et se pourvoir très rapidement en cassation pour que la cour renvoie le procès au civil, mais il faudra que la loi ait déjà été votée et publiée au BO, soit une grâce royale», explique Hicham Rachidi.