Le lion et le caméléon

Il n'est ni arabe ni berbère,
Parce que justement mi-arabe et mi-berbère,
Et bien qu'il sache oû se trouve sa terre,
Il se méfie, comme par principe, de ses frères
Et finit, malheureux, ni sociable ni solitaire...

Ni instruit ni ignorant,
Ni humble ni fanfaron,
Il cite facilement le Coran
Qu’il a appris quand il était enfant,
Mais il en oublie vite les leçons!

Ni moche ni vraiment beau,
Naturel, sans rien de faux,
Il aime se gonfler de mots
Car il n’est ni faible ni fort,
Mais très fier de son corps...

Ni courageux ni lâche,
Ni peureux ni bravache,
Quand il est dans sa cache,
Il manie pourtant la cravache,
Par amour des peaux qu’il arrache...

Ni sobre ni alcoolique,
Il tâte de tout, il traffique,
Mais au moindre malaise, panique
Se crée des réactions allergiques
Et devient plus rigoureux qu’un sikh!

Ni fin ni vraiment grossier,
Il a appris à esquiver la vérité
Et préfère l’humour et la gaieté
Aux casse-têtes, lourds ou légers
Mais refuse d’y voir de la facilité!

Ni paresseux ni travailleur,
Il ne se couchera jamais de bonne heure,
Mais se réveillera la mort dans l’âme,
Furieux contre le réveil et son alarme,
Qu’il arrosera de mots infâmes!

Ni complètement passif, ni politisé,
Il a appris à courtiser son échiquier,
Et il a misé pour l’approche biaisée
Qui fait de lui le meilleur gibier,
Et le livrera pieds et poing liés...

Arabe, berbère, c’était un lion,
Au regard et à la crinière de feu!
Aujourd’hui? C’est un caméléon
Qui fait juste ce qu’il peut,
Et en oublie ce que vraiment il veut.