Lors de la dernière séance parlementaire de l’année, devant des députés et des millions de marocains qui suivaient en direct sur la télé, le Chef du gouvernement répond au parti de l’opposition en l’accusant implicitement de nuire au pays par l’évasion de capitaux. Cette affaire d’appartements a été évoquée depuis des mois et personne n’a bougé le petit doigt pour réagir ou porter plainte afin de récupérer ces capitaux.
Maintenant que le parlement a adopté l’amendement de l’amnistie sur les avoirs à l'étranger, projet déposé par Benkirane lui-même en décembre dernier et fidèle à sa politique de «3afa Allaho 3ama salaf», oublions le passé, quel est l’intérêt de faire dépoussiérer et ressortir un tel dossier ?
On pourrait accepter qu’un simple citoyen ou même un député évoque une telle affaire, mais que le Chef du gouvernement se contente de faire allusion sans accuser ni donner suite, ni poursuite juste dans le but d’intimider le parti de l’opposition, un comportement que je considère comme une insulte à l’Etat de droit. Si nous étions dans un pays de lois, le plus simple serait d'appliquer la procédure judiciaire pour poursuivre la personne en question et récupérer les capitaux.
Les jeux politiques avant la justice
Laisser le champ libre à ce type de déclarations et de sorties médiatique prouve que notre justice est fragile et que le respect des lois se fait en fonction des jeux politiques. Ainsi, ce tapage médiatique et ces déclarations dépassées ne sont pas une forme de liberté d’expression, ni de transparence mais du «foutage de gueule» pur et simple.
Nous ne sommes pas sur un plateau de jeux télévisés où deux équipes se battent pour avoir le privilège d’être nommé vainqueur en fin de programme. Nous sommes dans un pays qui à une image à soigner, une constitution qui doit normalement être appliquée et respectée et surtout un peuple qui se trouve au milieu de cette guerre entre partis qui ne l’intéresse plus et dont il est devenu l’unique victime.
Istiqlal/RNI : deux poids, deux mesures
Nous sommes aujourd’hui devant deux scénarios. D’un coté, si le Chef du gouvernement dispose de preuves à ces accusations mais opte pour ne rien faire quoique disposant de toutes les autorités qui lui sont conférées, cela fait de lui un complice et pire encore, son discours de lutte contre la corruption et la transparence s’effondre.
D’un autre coté, s’il n’a pas de preuves et il s’est amusé à balancer des accusations au sein du parlement juste pour intimider l’opposition. Cela prouve son irresponsabilité et son manque de respect à son pays, à ce parlement ainsi qu’à son parti.
La position de Monsieur Benkirane doit être claire. Ce n’est pas parce que l’Istiqlal n’est plus au gouvernement qu’il faut sortir les vieux dossiers et régler les comptes et ce n’est pas parce que le RNI est dans le même bateau aujourd’hui qu’il faut oublier l’affaire des primes. On ne change pas de position à chaque nouvelle composition de notre gouvernement, parce que c’est le pays qui en paiera le prix !