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Grand Angle

Code numérique : Quel modèle de Corée suivrons-nous ? [Edito]

Que s’est-il passé au sein de l’équipe du ministre en charge de l’Economie numérique, Moulay Hafid Elalamy pour déposer un projet de loi aussi important au Secrétariat général du gouvernement alors qu’il n’a pas été soumis à la consultation des acteurs du secteur ?

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Temps de lecture: 3'

Le vendredi 13 décembre à 17h09, Boubker Badr, Directeur de l’Economie numérique au sein du ministère de tutelle, annonçait sur twitter la disponibilité du projet de Code numérique sur le site du Secrétariat général du gouvernement (SGG) et appelait les internautes marocains à donner leur avis. Cela n’aura pas tardé puisque très rapidement les esprits se sont échauffés sur twitter d’abord, facebook ensuite. Plusieurs articles de ce code scandalisent, à juste titre, de nombreux internautes.

L’article 24 notamment qui affirme tout d’abord que les communications numériques en ligne sont libres, mais s’empresse de circoncire ces libertés immédiatement après. Au lieu d’indiquer qu’elles ne sauraient échapper aux autres lois (notamment le code pénal, ce qui est déjà le cas avec ou sans Code numérique), les auteurs se livrent à une liste approximative de cas trop flous pour mériter d’être dans un texte juridique. Par exemple, cette liberté n’est pas envisageable par les exigences du service public ( ?), par les contraintes inhérentes aux moyens de communications en ligne, ou par le caractère pluraliste de l’expression des courants de pensée. En fonction de la libre interprétation par un juge de cette liste, l’internaute voit sa liberté d’expression sur internet réduite à sa plus simple… expression.

Un juge ? Pourquoi faire ?

Certains articles de ce Code numérique n’auront même pas besoin d’un juge. Ainsi, l’article 81 par exemple, permet l’interception de communications privées par un moyen numérique en ligne sans le consentement des utilisateurs, mais surtout sans décision judiciaire, si la «personne y est légalement autorisée». Cela laisse toute la latitude à la police, un gendarme, ou pourquoi pas un inspecteur des impôts, de surveiller vos communications privées sans même en référer au préalable à la justice, juste parce que la personne est autorisée par le ministère de l’Intérieur ou celui des Finances. L’article 73 ne s’embarrasse pas non plus d’un juge, en donnant pouvoir à «l’autorité compétente» de notifier aux prestataires (l’hébergeur du site ou le fournisseur d’accès à internet) «d’empêcher l’accès sans délai».

Ces trois articles -mais il y en a d’autres- doivent amener toute personne ayant quelques bases de droits et plus largement tout individu soucieux de préserver ses libertés fondamentales, à se poser la cinglante question : comment un texte juridique aux articles aussi approximatifs a pu être validé par le ministre Moulay Hafid Elalamy et atterrir au SGG ? Comment peut-on ignorer les consultations avec les acteurs du secteur pour recueillir un large consensus. Pourtant, l’ancien patron de la CGEM a toujours été un grand défenseur du dialogue entre gouvernement et acteurs privés ou société civile quand il s’agissait de défendre les intérêts de ses pairs.

Précipitation ou ballon d’essai ?

A-t-il pêché par précipitation ? Ou tente-t-il un ballon d’essai pour tester l’opinion publique et ensuite ajuster au plus faible dénominateur commun ? Le projet de loi a en tout cas été très rapidement retiré du site du SGG ce lundi pour, officiellement, «faire l’objet d’un large consensus». La vigilance des internautes, de la société civile et notamment les organisations de défense des libertés publiques, ainsi que les acteurs de l’économie numérique est plus que jamais nécessaire. Il ne s’agit pas de négocier un meilleur code numérique que celui proposé, mais veiller à ce que les libertés ne soient pas négociables. Ne nous trompons pas, ce code est d’une importance cruciale pour jeter les bases juridique de notre vie sur les réseaux, et il ne s’agit pas de faire sans, comme si le vide juridique pouvait protéger l’individu de poursuite judiciaire. Mais faire semblant d’accorder un droit, pour encore mieux tout contrôler nous rapproche des pays ennemis des libertés numériques. La censure du site Lakome.com avait été un signal annonciateur de ce projet de loi. Le Maroc, les autorités et les citoyens vont devoir désormais trancher : du nord ou du sud, quel modèle de Corée suivrons-nous ?

Quel modèle...
Auteur : Mohhe
Date : le 17 décembre 2013 à 19h43
Encore faut-il que nous émancipions notre langage et notre psychologie de l'emprise (de la classe) des Moulays.
Auteur : Ahmed12345
Date : le 16 décembre 2013 à 23h45
Après avoir lu le projet de loi sur le code numérique et lus quelques articles concernant ce sujet, je commence à avoir des doutes sur les journalistes marocains. Vous vous êtes focalisé essentiellement sur le négatif et avait tous omis le cote positif. Le projet met en avant l’e-gouvernance, la transparence des entreprises sur le net et la protection de la vie privé des internautes. Ce texte doit être lu par deux entités pour être compris complètement, il faut un avis juridique et un avis technique. D’un point de vue technique il ne peut être appliqué que dans un réseau « intranet » ou tous les participants sont identifiables par une signature électronique ou biométrique pour éviter l’usurpation d’identité. L’internet tel que nous le connaissons maintenant a énormément de failles et soulève beaucoup de questions en ce qui concerne la vie privé des internautes. Quelqu’un de mal intentionné peu se connecté à un réseau publique, avoir accès a votre compte de messagerie ou votre compte sur un réseau social ou votre ordinateur, et publié et modifié ce que bons lui semble. Et grâce à cette loi il peut aussi vous dénoncé. Il ne manquerait plus qu’une prime ou un moyen de chantage pour en faire un business juteux. Mais bon cela reste en théorie, en pratique j’aurais juste une question a posé : Pourrat on encore téléchargé des torrents ? Car dans tout le texte il n’y a pas une mention sur la propriété intellectuelle.
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