10 mois après la fameuse Une de Maroc Hebdo sur «Le péril noir», l’hebdomadaire marocain récidive et publie en Une de son numéro du 13 au 19 septembre, «Le Maroc pris au piège» sur fond de Subsahariens assis et abattus, la tête entre les mains. Dans le numéro de cette semaine, il fait référence à la première polémique en encadré : «le titre de la Une avait suscité une grosse polémique poussant de nombreuses personnes à nous traiter de racistes», pour conclure, comme une revanche, «toujours est-il que l’histoire nous a donné raison, malheureusement, pour les Subsahariens. Ceux-ci vivent dans de très mauvaises conditions.»
L’ensemble du dossier est ambigüe comme cette dernière phrase. Le titre laisse entendre que les immigrés Subsahariens posent un grave problème au Maroc. «Le Royaume pays d’accueil, malgré lui, d’immigrés subsahariens. Une charge dont il n’a pas les moyens», indique le sous-titre. Pourtant, la quasi-totalité de l’article principal du dossier fait l’éloge du rapport du CNDH, rendu public lundi 9 septembre qui propose une politique migratoire nouvelle et généreuse de la part du Maroc.
Quel piège ?
Quels arguments légitiment alors l’intitulé du dossier ? Où se trouve le «piège», dernière version du «péril» noir ? «En quelques années, le nombre d’immigrés subsahariens a quadruplé. Et il va crescendo», note le journaliste, sans se donner la peine de préciser un seul chiffre, ni sa source. «Pour le Maroc, ce déferlement massif d’immigrés est une charge supplémentaire dont il n’a pas besoin, ajoute-il plus loin. «Comme pour boucler la boucle nos voisins algériens nous mettent sur le dos les immigrés qui viennent de leur vaste contrefort saharien. Ils les acheminent, avec une diligence infinie, jusqu’à nos frontières orientales», tient-il à souligner pour renvoyer une nouvelle fois la responsabilité vers l’Algérie.
Le nombre d’immigrés subsahariens arrivés dans le royaume est le seul est unique argument venu appuyer l’utilisation du mot «piège». Début août, le Conseil de la communauté marocaine de l’étranger (CCME), l’Institut de recherche sur les politiques publiques (IPPR, institut britannique) et l’Union Européenne publiaient une étude selon laquelle, le nombre de Subsahariens sans papiers n’excédait pas, en réalité, les 10 000 pour 32 millions d’habitants que compte le Maroc, soit 0,031% de la population marocaine.
Une revanche
Trois hypothèses peuvent néanmoins expliquer le choix éditorial de Maroc Hebdo : un esprit de revanche «nous vous parlions des Subsahariens et nous avions raison, voyez, il s’agit bien d’un problème puisque le roi lui-même exige une nouvelle politique», aurait pu écrire le directeur de publication ; un manque de professionnalisme qui rend la rédaction incapable de titrer de façon pertinente un article ; l’envie de voir se répéter le pic de ventes dont a bénéficié le magazine en novembre dernier grâce à la polémique.