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Grand Angle

France : « Il y a davantage de salafis issus de familles immigrées algériennes que marocaines »

«Du Golfe aux banlieues - Le salafisme mondialisé», c’est le titre du nouvel ouvrage de Mohamed Ali Adraoui, sociologue et chercheur spécialiste de l’islam, sorti ce mois de mars. Paru aux éditions Presses Universitaires de France dans la collection Proche-Orient, l’ouvrage est basé sur la thèse de doctorat du chercheur français d’origine marocaine. Un ouvrage qui fait l’état des lieux du salafisme dans le monde musulman et notamment au Maroc, mais également dans les banlieues françaises. Interview.

Publié
Du Golfe aux banlieues - Le salafisme mondialisé, nouvel ouvrage de Mohamed Ali Adraoui.
Temps de lecture: 4'

Yabiladi : Qu’est-ce que le salafisme ?

Mohamed Ali Adraoui : Le salafisme est un courant religieux désignant plusieurs réalités. Sur un plan politique, il fait aussi bien référence à des groupes quiétistes [ceux qui entreprennent un acheminement vers Dieu] qu'à des formations politisées, ou jouant le jeu des élections que des mouvements usant de violence pour renverser des régimes honnis. En tant que vision fondamentaliste, il s'agit de revenir aux fondements de la religion. Une vision qui met au cœur de la prédication, la recherche de la preuve islamique (dalil) sur lequel repose dès lors le sentiment de maîtriser objectivement les sources sacrées, que sont le Coran et la Sunna du Prophète. Sans oublier le athar, la trace des Compagnons et des Salaf Salih (Sages Anciens). Ainsi, les salafis défendent l'idée que l'islam véritable peut être atteint à travers une méthodologie rigoureuse.

Comment expliquez-vous que le salafisme ait pu se globaliser aussi vite et atterrir dans les banlieues françaises ?

MAA : Sociologiquement et politiquement, le salafisme s'est mondialisé depuis plusieurs décennies, et ce sous l'action de certains Etats tel que l'Arabie Saoudite, épicentre de cette offre religieuse, qui défend depuis sa création, les vues orthodoxes de la salafiyya. Il y a aussi une demande, puisqu’un grand nombre de personnes se sont éloignées des appartenances religieuses liées à des cultures spécifiques. Le salafisme correspond à une manière moderne de concilier une orthodoxie revendiquée avec certains aspects de la mondialisation et de l'époque contemporaine, telles l'appétence pour l'économie de marché et le peu d'entrain pour l'activisme politique lorsqu'il s'agit des quiétistes.

Faut-il avoir peur du salafisme aujourd’hui?

MAA : Tout dépend de qui on parle. En termes sécuritaires et idéologiques, les quiétistes sont, non seulement, opposés à ceux qui légitiment la violence mais ils entendent également les discréditer religieusement. La question concerne davantage le rapport au reste de la société ou encore le lien aux coreligionnaires. Il est vrai que la prédication salafie engendre une forme de concurrence, que l'on retrouve de manière claire sur le web. Elle engendre aussi des tensions intellectuelles puisqu'elle se présente comme véridique et donc comme source d'inspiration. Ce qui participe à un discrédit plus ou moins revendiqué des autres offres religieuses, même si elles sont islamiques, comme le soufisme, le tabligh ou encore les Frères Musulmans.


Quelle est la particularité du salafisme marocain. Est-il différent du salafisme égyptien, algérien ou saoudien ?

MAA : Sur un plan strictement religieux, le salafisme marocain n'est pas spécifiquement différent du salafisme dans d'autres pays, dans la mesure où on retrouve les mêmes principes, à peu de choses près. Néanmoins, d’un point de vue sociologique, par comparaison avec la France, j'ai pu remarquer qu'il y a des différences en termes de comportements chez certaines personnes. A titre d'illustration, j'ai pu remarquer que les salafis marocains, du moins ceux que j’ai rencontrés, sont moins radicaux dans leur discours. Cela s'explique d'après moi, par leurs origines sociales ainsi que par le fait qu'en France, il s'agit non seulement de s'opposer aux coreligionnaires, vus comme déviants, voire surtout à une société majoritairement non musulmane et même vécue comme inique [contraire à la justice]. Ce qui est très différent de la société marocaine.

Les salafis marocains inquiètent-il les autorités du royaume ?

MAA : Si l'on parle des salafis qui légitiment ou pourraient avoir recours à la violence, oui, de manière claire, les Etats craignent des attentats, des prises d'otages ou des attaques contre leurs intérêts ou contre leur population. C'est d'ailleurs ce qui explique la coopération du Maroc et d'autres pays avec la France dans le cadre de l'opération en cours dans le Sahel. Pour les quiétistes, ils ont été mis en avant parce que ce sont des défenseurs de l'ordre politique établi. Car ils sont réfractaires au militantisme politique et à la contestation des régimes musulmans, même s'ils sont imparfaits, ils sont vus par certains dirigeants comme des facteurs de légitimation interne, ce qui explique leur promotion dans certains pays.

Place aux jeunes des banlieues françaises. Certains choisissent de venir au Maroc pour faire leur hijra. Le Maroc est-il plus prisé par ces jeunes, car étant un pays touristique, ça passe plus «inaperçu» de venir dans ce pays, qu’aller par exemple en Algérie ?

MAA : Non, pas du tout. Il y a beaucoup plus de personnes salafies qui font leur hijra, leur migration salutaire vers l'Algérie qu'en direction du Maroc, ne serait-ce que parce qu'il y a davantage de salafis issus de familles immigrées algériennes que marocaines. C'est pour cette raison que, souvent, le pays d'origine des parents est prisé. Il y a donc certains salafis qui viennent au Maroc, mais également beaucoup en Algérie. Certaines personnes qui ont embrassé l'islam font aussi parfois le même chemin. C'est intéressant car, en un sens, les salafis font le chemin inverse de leurs parents et valorisent la vie au Maroc, en Algérie ou ailleurs pour des raisons religieuses, alors que les représentants des générations précédentes cherchaient avant tout la promotion sociale et une vie meilleure, pour eux et leurs enfants.


Pourquoi ces jeunes, ayant grandi en France, choisissent-ils de suivre la voie du salafisme ?

MAA : Il y a la fatigue et la crise des offres d'islam qui ne sont pas salafies, telles que celles représentées par les acteurs de l'islam militant comme l'UOIF (Union des Organisations Islamiques de France) ou d'autres plus piétistes tel que le Tabligh. L'individualisme, voire l'hyperindividualisme, touche de manière claire les musulmans. Pour être embrassé, le salafisme doit être déconnecté de toute autre forme d'appartenance culturelle. On peut être salafi et de n'importe quelle nationalité. Le but étant uniquement religieux, en dehors de toute velléité, de transformation du monde, autrement que par la prédication. En cela, on peut affirmer que ce courant correspond à une forme de post-islamisme, ou plutôt, pour être plus précis, d'un islamisme de la sortie de l'islamisme.

Mohamed Ali Adraoui donnera une conférence demain, jeudi 21 mars, autour de son livre, à Sciences Po Collège universitaire Campus de Menton à 17h30, heure française.

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Auteur : Elmigos
Date : le 05 juillet 2014 à 15h55
Barakallah oufik ta tout dit
barak'Allah fik
Auteur : maB2rOc
Date : le 08 juin 2013 à 13h01
merci pour les éclaircissement !!
la salafiya nese divise pas en 3 et wikipedia est modifiable par n'importe qui
Auteur : sam94000
Date : le 07 juin 2013 à 11h28
Abbassi madani et le Fis n'est pas salafi, il fait parti de la secte des freres musulmans (comme enahada aujourd'hui en tunisie, tariq ramadan, al qardawi, etc) qui velent prendre le pouvoir d'abord en sortant contre le gouverneur puis par des éléctions.
Ali balhadj fait parti des takfiri (néo khawarij)(comme Ansar Asharia en tunisie, ben laden, al qaida (voir commentaire de maB2rOc ) qui veulent prendre le pouvoir d'abord en sortant le gouverneur puis en s'imposant par la force.
Donc au début il allient leurs force pour faire chuter le gouverneur, ensuite il se combattent entre eux.
La salafiya est innocente de tout ca puisque il n'est ni légiféré de sortir contre le gouverneur, ni de prendre le pouvoir par les élection.
le fait de dire que la salafiyya se divise en 3 catégorie permet d'attribuer les erreurs et les crimes des takfiri et des frere musulmans à la salafiya, alors que cela est totalement faux.
Il suffit de regarder l'actualité récente en tunisie :
"la salafiste d'ennahada ont prit le pouvoir" (ce des freres musulmans)
"les salafistes de Ansar Asharia combattent le gouvernement, alors qu'il sont takfiri) (ils ne disent plus que le gouvernement est salafiste du coup)
que la bénédiction d'Allah soit sur toi
Auteur : maB2rOc
Date : le 25 mars 2013 à 21h24
barak'Allah fik
...
Auteur : dzkiller
Date : le 22 mars 2013 à 11h49
"car étant un pays touristique, ça passe plus « inaperçu » de venir dans ce pays, QU'ALLER EN ALGÉRIE PAR EXEMPLE ? "...

et quel exemple ... looool j'ai l’impression que la comparaison avec l'Algérie est primordiale pour vous lol
(et dans tous les sujets ...)

quant à la question je l'a trouve assez inopportune dans le sens ou les salafis veulent assembler tous les facteurs possibles pour réunir la vie d'antan à l'époque du prophète SWS
hors... bref
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