L’année 2012 se conclut sur une baisse globale des transferts financiers de la diaspora marocaine à destination du Maroc. Les recettes MRE baissent de 4% en 2012, par rapport à 2011, pour s’établir à 65,3 milliards de dirhams. Le royaume a perdu, cette année, 2,4 milliards de dirhams de transferts. Il s’agit de la première baisse des transferts depuis la période 2008-2009, avec la crise financière. Elle s’est creusée tout au long de l’année 2012. De -1,7%, en août, les transferts tombent à -3,3% en septembre pour atteindre 4% aujourd’hui.
La réduction de ce flux n’a donc rien d’exceptionnelle : elle reflète fidèlement la situation économique des Marocains dans leur pays d’accueil. Elle fait écho, également, à une autre réalité que la Fondation Mohammed V, comme le ministère des MRE ne veut pas voir : la forte baisse du nombre de MRE à revenir au Maroc chaque été. Cette année, cette baisse, selon les chiffres que nous avons pu recueillir, s’établit déjà à 14,2%.
Cercle vicieux économique
Si elle ne surprend personne, la baisse de 4% des recettes MRE a un impact négatif très fort sur l’ensemble de l’économie marocaine. En 10 ans, jusqu’en 2011, elles ont augmenté de 58,9% pour constituer près de 10% du PIB marocain. Parallèlement, le déficit commercial du pays a eu tendance à se creuser. Le royaume a donc plus que jamais besoin des devises apportées par les transferts de fonds des MRE. Avec une croissance économique de 2,9%, au troisième trimestre 2012, la chute des recettes MRE entretient un véritable cercle vicieux.
Paradoxalement, El Mouhoub Mouhoud, professeur d’économie à l’université Paris Dauphine, estime que cette baisse peut constituer une opportunité pour le royaume car les transferts de fonds vont de pair avec une faible performance des économies récipiendaires : ils servent bien à amortir les chocs mais ils ne seraient pas à même de provoquer une croissance nette de l’économie. Comme les faibles performances économiques de plusieurs pays riches en pétrole, la manne des transferts, comme celle du pétrole, formerait une économie de rente sans dynamisme.
La malédiction des pays rentiers
Aujourd’hui, la part des transferts dédiés aux investissements est extrêmement faible : 3% selon le dernier chiffre annoncé par le ministre marocain délégué auprès du premier ministre en charge de la Communauté marocaine à l’étranger Abdelatif Maazouz. Le ministère des MRE, mais surtout l’Union européenne au Maroc, cherche à dynamiser les transferts en les transformant en plus grande proportion en investissements directs au Maroc. En 4 ans, dans le cadre du programme PACE, 236 sociétés ont été créées au Maroc sur la base de fonds MRE, pour 85 millions de dirhams. Cette somme ne représente que 0,1% du total des 56,3 milliards de dirhams de transferts reçus par le Maroc des MRE, en 2012.
La crise conjoncturelle des transferts serait aussi l’occasion pour le royaume de diversifier ses sources de devises, estime El Mouhoub Mouhoud. Aujourd’hui, les réserves de changes du pays sont extrêmement étroites. A l’heure actuelle, elles couvrent à peine trois mois d’importation. Durant les 11 premiers mois de l’année le Maroc a perdu plus de 30 milliards de dirhams de réserves de changes.