Le Direction de la lutte contre l’analphabétisme [DLCA] a récemment publié ses derniers chiffres sur l’analphabétisme au Maroc au titre des années 2011 et 2012. Résultats : 9,6 millions de Marocains sur les 32 millions d’habitants sont concernés par ce fléau, soit 30 % de la population, rapporte La Vie éco. Ce taux est de 55% dans le monde rural, plus touché par l’analphabétisme.
Selon la DLCA, ces chiffres sont déterminés suivant des modèles mathématiques basés sur l’évolution démographique, les réalisations et la scolarisation. Mais les associations persistent et émettent des réserves quant à la fiabilité de ces données.
Statistiques loin de la réalité ?
Mohamed Zaari, directeur de Pôle Education, juge que les 30% d’analphabètes avancés par la DLCA, «ne reflètent pas la réalité». «Je respecte le travail de l’Etat, mais en tant qu'acteur de terrain, ces chiffres ne me paraissent pas corrects», indique-t-il à Yabiladi.
Autre point : les lacunes du système d’évaluation, relève M. Zaari. La DLCA avait lancé un programme d’alphabétisation en 2006 pour lutter contre le fléau. Et entre 2011 et 2012, 735 000 personnes ont bénéficié de ce programme, selon les données officielles. «Généralement les autorités ne parlent que des chiffres», regrette le militant associatif. «Le bénéficiaire du programme obtient-il des résultats ? En 300 heures d’alphabétisation arrive-t-il à acquérir les notions nécessaires ?, s’interroge-t-il. Selon M Zaari, l’Etat «devrait privilégier la pérennité des connaissances» dans son programme d’alphabétisation.
Pôle Education n’est pas la première ONG qui émet des réserves quant aux chiffres officiels de l’analphabétisme. La Fondation Zakoura Education les a complètement contestés l’année dernière. Son directeur général, Youssef Mouaddib, situait plutôt le taux d’analphabétisme autour de 50%. Ces réserves et contestations sont émises d’une part, suite à l’expérience sur le terrain, comme le signale Mohamed Zaari et d’autre part aux «contradictions» notoires entre entités officielles. Selon la DLCA, le taux d’analphabètes diminue en moyenne d’1 à 1,5 point par an, justifiant le passage de 43 % en 2004, à 30 % en 2012. Or, le HCP fixait ce taux à 39,7% en 2010, soit un recul de plus de 9 points en l’espace de deux ans. De plus, les 30% d’analphabètes seraient valables en 2011 et 2012, donc aucune baisse n’aurait été enregistrée entre les deux années, ce qui remettrait en cause l’efficacité du programme d’alphabétisation sur cette période.
L’ONDH cherche ses propres chiffres
L’Observatoire national pour le développement humain [ONDH] a toujours travaillé sur la base des données officielles [HCP, ministère,…] et ne saurait les contester, fait savoir Hassan El Mansouri, directeur du pôle partenariat et coopération à l’ONDH contacté par Yabiladi. Cependant, «nous avons lancé une enquête panel pour étudier nous-même sur le sujet, mais les résultats ne sont pas encore disponibles», indique M. El Mansouri, annonçant la publication des chiffres de l’ONDH sur l’analphabétisme «dans deux à trois mois».