«La mosquée est tombée, c’est la faute au barbier». Cet adage marocain sied parfaitement à l’accident de la circulation survenu dès les premières heures du mardi près de Marrakech. A trois semaines du deuxième anniversaire du Code de la route, sensé diminuer le nombre des accidents au Maroc, nos routes continent de tuer. Un drame qui a causé la mort de 44 morts et d'une vingtaine de blessés. Sans attendre les conclusions de l’enquête diligentée par ses services, le ministre des Transports et de l’Equipement, le même jour sur le journal Al Oula, pointait du doigt deux facteurs responsables, selon lui, de cette tuerie : la surcharge, 11 passagers de plus, et la vétusté de l’autocar.
Sur l’état de route, Aziz Rebbah ne dira point mot. Et pourtant, l’accident s’est produit à Tizin Tichka, l’un des passages les plus difficiles au Maroc. Construit en 1924 par les Français pour mettre un terme à la rébellion des tribus du sud du Grand Atlas, ce tronçon est resté à l’abri de l’évolution à l’exception de quelques couches de bitumes appliquées de temps à autre, rien n’a changé alors que le trafic n’est plus le même qu'au temps de la colonisation.
Vingt-quatre heures après ce drame, une commission présidée par le chef du gouvernement endosse les conclusions de Rebbah et décide l'ouverture d'une enquête visant le centre de la visite technique qui a déclaré l’autocar apte à la circulation alors que le ministre avance que le véhicule serait «vétuste», la direction de la gare routière de Marrakech et les points de contrôle de la gendarmerie entre la ville ocre et Zagora.
«Rebbah est le premier responsable»
Au sortir de la réunion du mercredi, tenu au siège de la primature, le ministre des Transports et de l’Equipement a souligné que selon «deux premiers constats bien établis, l’autocar transportait onze passagers de trop et était en mauvais état». Une version qui ne semble guère convaincre les professionnels. Contrairement à ces déclarations du mardi, Rebbah ne s’est pas aventuré à imputer la responsabilité du drame d’Al Haouz à ces parties très impliquées dans la guerre des routes au Maroc.
Pour Mohamed Mahdi, le secrétaire général de l’Union des syndicats professionnels du Maroc, «le premier responsable est Aziz Rebbah et non pas le facteur humain. Ce gouvernement comme les autres équipes qui l’ont précédée accorde la priorité aux autoroutes et oublie le reste. Les routes autrefois principales sont devenues secondaires à cause de la négligence et de l’absence d’entretien».
Et d’ajouter, non sans regret, qu’ «endosser la responsabilité des accidents aux chauffeurs professionnels est une solution facile alors qu’ils ne sont que des victimes des propriétaires des agréments et des autocars. Le chauffeur est obligé de rouler plusieurs heures sinon il sera mis à la porte sans le moindre ménagement. Il est temps pour abolir le système des agréments qui profite à une minorité».
Menace de grève nationale
Le drame d’Al Haouz a remis en selle les revendications du secteur. Le samedi 8 septembre, Casablanca abrite une assemblée générale de l’Union des syndicats professionnels du Maroc. «Ce sera l’occasion de discuter des problèmes du secteur et prendre des mesures à même de garantir la protection des professionnels. L’option du recours à une grève générale est envisagée, sachant que notre dernière rencontre avec le chef du gouvernement, en juin dernier, n’a rien donné. Et pourtant nous avons clairement présenté à M. Benkirane la situation dans laquelle patauge le secteur», conclut Mohamed Mahdi. Au printemps 2009, le Maroc avait connu un débrayage sans précédent des Transports.