Yabiladi.com : Vous avez participé mercredi, à Rabat, à la manifestation contre l’allégeance au roi. Racontez-nous comment tout cela a commencé.
Hamza Mahfoud : Nous avons d’abord créé un événement sur Facebook qu’on a baptisé : «la Fête d'allégeance à la dignité et à la liberté». Plus de 15 000 personnes ont reçu des invitations pour y partciiper. Finalement, plus de 1500 ont répondu favorablement à l’invitation. Ce ne sont que des estimations bien sûr, mais cela nous sert d’indicateur pour pouvoir mesurer le nombre de personnes qui seront réellement présentes le jour J.
De nombreuses activités artistiques étaient programmées pour cette «fête», du théâtre, de la poésie… L’annonce de l’événement faisait déjà beaucoup parler la presse étrangère. L’AFP et Reuters ont notamment relayé l’information qui a été par la suite reprise par de nombreux supports étrangers.
Que s’est-il passé par la suite ?
H.M : Comme convenu, on est arrivés aux alentours de 17h50 sur le lieu où était prévu le rassemblement. Au départ, on était une dizaine, puis d’autres personnes nous ont rejoints ensuite. Il y avait principalement des militants, des membres du M20 et des journalistes étrangers venus couvrir l’événement. C’est alors qu’on a été surpris par l’intervention brutale des forces de l’ordre. Ils insultaient et tapaient toutes les personnes qui étaient à leur portée…. hommes, femmes, enfants, sans distinction. Ils voulaient à tout prix saisir tout ce qui est caméras, appareils photos, téléphones portables pour éviter la publication des photos démontrant les violences de la police.
Vous avez vous-même subi des agressions de la part des forces de l’ordre...
H.M : Oui effectivement, j’ai reçu plusieurs coups. On m’a même déchiré la chemise blanche que je portais ce jour-là. Le caïd de Rabat (ndlr : l’homme qui porte des lunettes noires sur la photo) est celui qui a été le plus violent à mon égard. Il m’a donné une gifle en pleine figure.
Le porte-parole du gouvernement et ministre de la Communication Mustapha El Khalfi a fait part de ses regrets à la direction de l’AFP, suite à l’agression de l’un de ses journalistes lors de la manifestation. Les journalistes marocains, eux, n’ont pas eu droit à des excuses. Qu’est-ce que vous en pensez ?
H.M : El Khalfi ne s’excusera pas. En tout cas, on ne s’attend pas à recevoir des excuses de sa part. Les Marocains ne font pas partie des préoccupations du gouvernement. Mais là, n’est pas la question. En agissant de la sorte, on nous a confirmé le citoyen marocain n’a pas de valeur aux yeux du gouvernement. De plus, El Khalfi n’est pas le commanditaire de cette violente intervention policière. Il ne fait que présenter des justifications insensées. C’est le roi et son entourage proche qui gouverne en réalité.
Pourtant cela faisait un moment que l’on n’avait plus entendu parler de violences policières lors des manifestations.
H.M : Peut-être, mais la répression n’a jamais cessé. Pas plus loin qu’il y a deux semaines deux militants du Mouvement du 20 février ont été placés derrière les barreaux pour avoir participé à un sit-in de soutien à d’autres manifestants arrêtés auparavant.
Qu’espériez-vous atteindre comme objectifs par l’organisation de cette manifestation ?
H.M : Cette cérémonie d'allégeance est pour nous le summum de l’humiliation. D’autant plus que les personnes qui y assistent nous représentent nous les citoyens, le peuple. Notre principal objectif à travers cette action était de réclamer la suppression de cette cérémonie qui renvoie une très mauvaise image de notre pays. Pour l’instant, nous avons réussi à susciter le débat et à lever les tabous qui entouraient cette pratique archaïque. Nous reviendrons l’année prochaine en plus grand nombre et Mamfakinch.