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Tribune

La faillite de l'enseignement public au Maroc

"On ne peut plus continuer avec la logique du tout gratuit à l'enseignement supérieur du Maroc ". C’étaient les déclarations de Lahcen Daoudi, ministre de l'enseignement supérieur au Maroc. Pour étaler plus de détails, ce dernier avait affirmé que "les plus aisés devraient contribuer au financement de leurs études puisqu'elles sont très coûteuses pour l'état". Le ministre n’a pas cessé depuis de retirer et de réaffirmer ses propos dont on aura un avant-goût avec la prochaine loi de finances … L’adoption de ces mesures risque d'en finir une fois pour toute avec l'enseignement public agonisant depuis des décennies.

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Autrefois, Hassan II avait affirmé dans une interview accordée à Jean Daniel qu'il ne voulait pas instruire son peuple, parce que ceux instruits sont devenus des opposants de son régime. Pis encore, après les émeutes de 1965, il s'est adressé au peuple en disant : " Vous les pseudos-cultivés, si seulement vous étiez des ignorants ".

Ces déclarations se sont transformées en des politiques désastreuses de l'enseignement visant à tuer l'éducation marocaine dans l'œuf. Le taux d'analphabétisme bien élevé a quasiment stagné durant trente ans, les écoles publiques ont vu leurs effectifs augmenter et la qualité des enseignements a drastiquement baissé, s’ajoute à cela une arabisation hasardeuse et bâclée des programmes suivi d'un encouragement excessif de l'enseignement privé au détriment de l’étatique. Ce sont les titres phares du règne d’Hassan II, un roi cultivé qui a consolidé l’ignorance de son peuple pour prévenir son éveil à l’égard de son despotisme.

Avec l'avènement de Mohamed VI, les choses ne se sont guère améliorées. Le taux d'analphabétisme dépasse encore 40% de la population. L'enseignement public souffre des multiples grèves des enseignants, grèves où les demandes sont souvent matérielles et négligent l'essence de l'éducation publique et son essor. Les programmes désuets et le surnombre des effectifs ne font qu'empirer la situation. C’est ce qui pousse maints foyers à opter pour un enseignement privé de qualité, tandis que les plus défavorisés n'ont guère le choix.

Un lycéen sur deux devient bachelier selon les statistiques officielles. La plus grande partie intégrera des facultés. Une minorité se dispersera sur des écoles de commerce, des écoles d'ingénieurs ou choisira une carrière de médecin. Ces voies constituent un ascenseur social pour les fils du peuple qui se sont démarqués lors de leur cursus estudiantin. Le coût de l'enseignement supérieur se résume dès lors à des frais d'inscription, d'internat et de restauration. Du moins jusqu'à ce que le ministre ne fasse ses déclarations et son intention d'intégrer ces décisions dans la prochaine loi de finances.

Le ministre El Ouafa a annoncé il y a quelques jours l’échec cuisant du plan d’urgence de l’éducation et de la formation. Un plan avec une enveloppe budgétaire de 3,3 milliards de DH. Une feuille de route bâclée et adoptée hâtivement qui n’a servi qu’à gaspiller l’argent du contribuable. Pour calmer l’opinion publique, on vous chante que le taux de scolarisation de  la tranche d’âge 12 à 14 ans est passé de 71,3% à 79,1% … Cela veut dire qu’en 2012, un enfant sur cinq appartenant à cette tranche ne fréquente pas l’école. Cela pousse à avoir honte et non à se vanter monsieur le ministre. Cerise sur le gâteau : les programmes et les manuels scolaires seront une énième fois changés afin de «s’adapter» à l’échec du plan cité ci-haut.

Ajoutez à cela un dernier rapport de l’UNESCO qui regorge de statistiques bien effrayantes : Le Cameroun, La Tanzanie et le Bénin nous dépassent en taux de scolarisation des enfants. En plus de cela, on est l’avant dernier pays arabe en taux de réussite au baccalauréat devançant … le Yémen. Le reste des statistiques ne nous lègue que les derniers rangs au sein du monde arabe.

Les seuils d’admissibilité au sein des instituts de l’enseignement supérieur a quant à lui atteint des records durant cette année : 18.30 pour la médecine militaire, 17.27 pour l’ENA et que des 16 à peu près partout. Certains étudiants munis de baccalauréats avec de très bonnes mentions ne sont même pas recevables  pour passer les concours de sélection dans ces instituts … Cela a engendré une grogne parmi les élèves qui se sont regroupée dans «l’union des étudiants le changement du système éducatif» et ont manifesté dans plusieurs villes le 6 Août.

Durant ce temps, notre gouvernement n'a guère trouvé le courage politique de s'attaquer à la corruption et à la gangrène qui touche le pays. Il a vite abandonné la lutte contre la rente et a enterré un projet de taxation des riches. Il continue cependant à louer une monarchie qui détient le pouvoir absolu par une constitution remaniée. Au lieu de mener de sérieuses réformes, on vise à détruire cet ascenseur social de la classe moyenne et des démunis. Des classes qui souffrent d'une baisse du pouvoir d'achat, ajoutez à cela une annulation de la gratuité de l'enseignement supérieur et de probables augmentations à venir et vous menacez directement la paix sociale du pays.

On subventionnera les plus démunis nous dit-on, mais depuis quand les riches fréquentent-ils les facultés publiques ? Les plus aisés envoient leurs fils depuis le primaire au sein d'établissements privés marocains ou français. Ces derniers continuent leurs études supérieures en France ou dans un établissement privé. Ils fuient l'enseignement public, car connu pour sa défaillance. Alors de qui se moque-t-on encore au Maroc ?

Heureusement que l'autodidaxie reste un refuge pour le marocain, jusqu'à ce qu'on la taxe elle aussi.

Visiter le site de l'auteur: http://mahdizahraoui.blogspot.com

Quel desastre
Auteur : Hamza
Date : le 09 août 2012 à 02h51


Un vrai desastre: un pays qui n éduque pas sa jeunesse est un pays qui ne pourra jamais décoller véritablement.

Il y a quelquechose de pourri dans ce pays: apprendre a lire , à écrire et à compter a des enfants jusqu'à l'age de 11 ans , est si difficile que ça pour un pays qui veut dépenses 33 milliards de dirhams pour un TGV qui ne sert à rien?( tout ça pour obtenir le soutient d un président français démaguogue et qui n est plus rien aujourd hui )
les pauvres !!!
Auteur : bihi49
Date : le 08 août 2012 à 17h06
- les riches , eux ils envoient leur enfants en GB aux USA !!
- la classe moyenne + : ils les envoient en france et espagne
- la classe moyenne - : vers l'europe de l'est .
Donc dire que l'enseignement sup au maroc ça profite au riche est une belle betise !!
Mon avis !
Auteur : berhoc
Date : le 08 août 2012 à 17h02
Si nous cernons bien le sujet de l’enseignement, je suis à 100 % d’accord avec l’auteur que c’est notre talon d’Achille depuis l’indépendance et on n'arrive même pas à décoller. Autre chose, je suis moins d'accord et je m’explique :

Le taux d’analphabétisme était de 43% en 2004 et il est aujourd'hui à 30 %. Il y avait une amélioration. Selon M. Kissami, spécialiste Alphabétisation au bureau de l’Unesco à Rabat.

Le Maroc figure parmi les 10 meilleures performances mondiales en matière de développement humain au cours de la période entre 1970 et 2010. La valeur de l’IDH ne cesse d’augmenter au Maroc. Le taux de croissance annuel moyen de l’IDH a atteint 1,28% entre 2000 et 2011 : Il faut dire le progrès est lent mais réel !

C’est normal que les seuils d’admissibilité augmentent avec l’augmentation des niveaux ! En 1992, avec 14/20 comme moyenne, en pouvait faire faculté de médecine car les moyennes étaient basses !

Pourquoi parler des taxations des riches et pas de l’annulation de taxe de l’audiovisuelle sur les pauvres ? Pourquoi ne pas évoquer l’impôt de solidarité mis en place par ce gouvernement ? ¨Pourquoi ne pas évoquer le système Ramed ? Et sortir avec une synthèse !

Par rapport à la nouvelle constitution, je ne suis pas tout à fait d’accord avec l’auteur non plus, on n’est pas dans le pouvoir absolu : Le citoyen peut être source de législation déjà grâce aux articles 14 et 15 qui permettent aux citoyens et associations de la société civile de présenter les propositions de loi, à travers des motions ou des pétitions. Le pluralisme culturel ou politique, nouveaux droits individuels (leur présentation est plus explicite). Notre chef de gouvernement a beaucoup plus de marge qu’avant ! C’est cela la spécificité de la monarchie marocaine, un partage du pouvoir entre le roi et un gouvernement représentatif, issu de la volonté populaire, de la majorité parlementaire ! (je me réfère surtout au professeur Mohamed DARIF) !
Dernière modification le 08/08/2012 17:35
Bravo
Auteur : simontemplar
Date : le 08 août 2012 à 16h25


Excellent article, sans comentaire
qui dit vrai!!!!
Auteur : brabrasud
Date : le 08 août 2012 à 15h50
Dans un article il y a même pas une semaine, on pouvait lire que le taux d'analphabétisme au Maroc à baissé par rapport à quelques années!!!

C'est vraiment du foutage de gueule!!!
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