54ème sur 158. C’est le rang «très confortable» qu’occupe le Maroc au classement des pays où le sentiment de sécurité est le plus élevé, a affirmé ce mercredi à la MAP, le ministre de l’Intérieur, M. Mohand Laenser.
En 2012, le climat de sécurité «est caractérisé par la stabilité et la tendance vers le renforcement croissant du sentiment de sécurité» a déclaré le ministre, adressant une note d’optimisme aux représentants de la commission de l’Intérieur, des régions et des collectivités locales de la Chambre des Conseillers réunis pour l’occasion.
Dans son exposé, M. Laenser a également tenu à souligner le niveau élevé de vigilance des services de sécurité et de gestion territoriale du Royaume en matière de gestion des défis sécuritaires, comme ceux de la lutte contre l’immigration clandestine ou encore contre le trafic de drogue.
290 000 affaires traitées avec un taux d’élucidation de 86% en 2012
En matière de lutte contre l’immigration clandestine, les services territoriaux ont par exemple réussi à mettre en échec 15.000 tentatives d'immigration illégale et à démanteler 35 réseaux opérant dans le domaine, a fait savoir le ministre, se satisfaisant de la diminution en aval du nombre d'immigrés clandestins qui gagnent les côtes européennes.
En regard de la lutte contre la criminalité, le ministre a par ailleurs souligné que les services de son département intensifiaient les efforts dans ce sens, particulièrement dans la lutte contre le crime transfrontalier. Selon lui, ces efforts ont été couronnés par des résultats sans précédent puisque les services concernés ont traité 290.000 affaires sur les premiers mois de 2012 – soit une hausse de 12 % en comparaison avec la même période l’an passé – avec un taux d'élucidation avoisinant les 86 %.
Pour le ministre, ces résultats positifs sont la conséquence directe de la politique suivie en matière de mobilisation des ressources humaines et matérielles ; une politique qui a permis à l'administration territoriale et aux services de sécurité d'améliorer leur rendement avec, pour corollaire, l'augmentation du sentiment de sécurité de façon générale, et de sécurité judiciaire en particulier.
Les policiers et gendarmes victimes régulières de violences
Les satisfécits du ministre occultent cependant plusieurs points. A commencer par le fait que le taux moyen de criminalité n’a pas reculé mais, au contraire, bel et bien augmenté au Maroc en 2012 : aujourd’hui, il se situe aux environs de 19 crimes pour 1000 habitants alors qu’il ne s’élevait «qu’» à 17 crimes pour 1000 habitants en 2011. Bien que selon lui, le sentiment de sécurité ne soit pas uniquement lié au taux d'évolution de la criminalité ou au niveau de présence des services concernés mais à la manière dont certaines questions sont communiquées et perçues, il n’en demeure pas moins que la connaissance d’un tel fait à de quoi inquiéter, qui plus est lorsque celui-ci se trouve conjugué à une deuxième réalité que l’exposé du ministre omet de mentionner, à savoir : la violence faite à l’égard des policiers.
Les agents de police et les gendarmes sont en effet de plus en plus régulièrement victimes de violence à travers le royaume. Dans son édition d’aujourd’hui, Al Massae relate trois incidents majeurs (un à Marrakech, un à Témara et un à Casablanca) qui se sont déroulés la semaine dernière durant lesquels les forces de l’ordre ont à chaque fois été prises pour cibles par des agresseurs armés.
Les délinquants n’ont plus peur du makhzen
Pour le quotidien arabophone, ces affrontements, «qui se produisent à un rythme d’environ une fois par semaine», «dénote d’une accélération sans précédent de la criminalité au Maroc». En outre, «l’usage de la violence contre les agents de police et de la gendarmerie reflète également la perte de l’autorité et de la peur du ‘makhzen’» souligne le journal. Aujourd’hui, les délinquants ne semblent plus craindre le makhzen, au point même qu’ils n’hésitent pas à l’attaquer. Selon Al Massae, la cause d’un tel basculement des rapports de force est liée à l’utilisation de plus en plus fréquente d’armes à feu du côté des criminels ; une prolifération inquiétante qui témoigne, souligne le quotidien, «de lacunes gravissimes dans le contrôle et la surveillance des armes au Maroc, mais aussi dans les licences distribuées aux gens pour leur possession».
Aussi, qu’il s’agisse du «signal d’alarme» tiré – peut-être trop précocement – par Al Massae ou de l’optimisme – peut-être forcé – par le ministre de l’Intérieur, difficile de dégager une vérité définitive sinon celle que le sentiment de sécurité est loin de faire l’unanimité au Maroc.