Un détenu islamiste d'origine algérienne est mort hier, après deux mois d’une grève de la faim qu’il avait entrepris pour dénoncer la torture et le mauvais traitement qu’il subissait en prison. C’est ce que révèle un article publié par Associated Press.
Condamné pour utilisation d’une arme à feu au consulat algérien d’Oujda, Ahmed Ben Miloud purgeait une peine de 20 ans de réclusion criminelle à la prison civile de Salé. Il n'en était qu'à son cinquième mois d'incarcération.
L’homme de 56 ans est mort après être resté plus de 60 jours sans manger. Son décès a été prononcé à l'hôpital Ibn Sina à Rabat dans la journée de dimanche.
L’Association Marocaine des Droits de l’Homme monte au créneau
Ce matin, l’Association Marocaine des Droits de l’Homme (AMDH) a confirmé la mort de M. Ben Miloud. «Nous n’avons aucune information exacte concernant les circonstances de son décès. D’ailleurs, ni sa famille, ni les associations de droits de l’homme n’étions au courant de la grève de la faim entreprise par M. Ben Miloud» a déclaré, ce matin, la présidente de l’AMDH, Mme. Ryadi, à la rédaction de Yabiladi. «La mort de M. Ben Miloud est un drame qui rappelle la situation alarmante des conditions de détention des prisonniers dans les prisons du royaume, notamment de celles des islamistes» a-t-elle ajouté.
Pour rappel, plus de 700 islamistes sont actuellement détenus dans les prisons marocaines, un chiffre qui a explosé depuis les attentats du 16 mai 2003 de Casablanca.
En dehors de la prise de position de la présidente de l’AMDH, il n’y a eu aucun commentaire officiel sur la mort de M. Ben Miloud de la part du gouvernement. Son décès n’a d’ailleurs même pas été couvert par les médias marocains.
Meilleures conditions de détention des prisonniers : la promesse non-tenue de Mustafa Ramid
Avant d’être ministre de la Justice, Mustapha Ramid était le président du forum Al Karama qui était monté au créneau à plusieurs reprises pour appeler à la libération des détenus salafistes et l’amélioration de leurs conditions de détention. Il avait d’ailleurs fait de ce double appel (libération et amélioration des conditions de détention) un leitmotiv électoral durant sa campagne pour les législatives de septembre dernier. Ses promesses ont-elles été honorées ?
Pour Mme Ryadi, la réponse est non. «A en juger par le nombre de plaintes déposées, de témoignages verbaux ou vidéos recueillis, ou de grève de la faim entreprises par les détenus, les conditions de détention des prisonniers ne se sont pas améliorées au Maroc. On peut même penser qu’elles se sont dégradées». Un témoignage qui révèle le grand écart entre les promesses de Ramid et la réalité de leur mise en application.
Selon la présidente de l'AMDH, le ministre de la Justice n’en serait d'ailleurs pas à sa première promesse non-tenue puisqu’il s’était déjà engagé à faire sortir de prison les membres du réseau Belliraj dont la condamnation pour «associations de malfaiteurs en vue de préparer et commettre des actes terroristes» en 2010 avait été jugée plus que «hâtive et partiale» par les ONG de défense des droits de l’homme. Or, il s’avère qu’à l’heure qu’il est, tous les membres de ce réseau, dont le supposé chef de file, Abdelkader Belliraj, croupissent toujours bel et bien en prison.
«Tant que la justice ne sera pas indépendante de l’exécutif et que nous, ONG, ne pourront pas avoir accès aux prisons, les conditions de détention des prisonniers au Maroc resteront des plus opaques, une situation qui continuera d'encourager l’abus et les dérives en tout genre en ce qui concerne leur traitement» conclut Mme. Ryadi.