RTM : trop, c'est trop!

Bruxelles, mercredi 29 décembre. L'heure affiche 19h30. Boulevard Lemonnier, haut lieu de la communauté marocaine en Belgique. Les cafés marocains commencent petit à petit à se remplir. Raison? Le Maroc joue un match amical contre la sélection de Navarre, en Espagne, et la RTM retransmet la partie.

Une très bonne opportunité pour les membres de cette communauté de se retrouver dans une ambiance chaleureuse, au milieu de ce froid glacial.

Les spots annonçant la retransmission de la rencontre le confirment : aucune restriction, même la RTM satellitaire diffuse le match. Au-delà des spéculations sur une éventuelle annulation de la rencontre en raison des conditions climatiques défavorables, la communauté comptait signer ses retrouvailles avec une équipe qu'elle porte dans son coeur.

Le défi est de taille: suivre les nouveaux joueurs, et dénicher, ici ou là, un signe prometteur pour le prochain match capital contre le Kenya. Oui, les Marocains à l'étranger s'intéressent à leur équipe, suivent son parcours, et s'y sentent engagés. Après tout, si elle se qualifie à la prochaine Coupe du monde, elle pourra compter sur leur soutien inconditionnel sur le Vieux Continent.

19h45. La RTM diffuse une nouvelle fois un spot confirmant la retransmission de cette rencontre, sans aucune restriction. De quoi calmer certains pessimistes. Toutes les places sont prises. Dans l'attente de cette rencontre, on parle des souvenirs, on évoque toujours avec autant de plaisir cette Coupe du monde au Mexique, on sort les anecdotes... Une ambiance bon enfant. On n'attend que le début de la rencontre pour ressortir les vieux slogans et encourager les protégés de Zaki.

Chronique d’une déception amère

20h00. La RTM présente les deux équipes sur le terrain, laisse écouter les deux hymnes nationaux et, au moment où les joueurs rejoignent leurs côtés respectifs pour entamer la rencontre, l'incroyable a lieu: la retransmission est coupée, la restriction est appliquée. Seuls les résidants au Maroc auront le droit de suivre cette rencontre.

On coupe le Maroc en deux, ce qui n'est pas sans nous rappeler une tactique coloniale. On prive ces marocains à l'étranger de suivre leur équipe. Partout, on partage le même sentiment: le dégoût. Une peine amère reste à travers les gorges.

On n'arrive toujours pas à croire. Un vrai coup bas. Rendez-vous annulés, soirées en famille abandonnées, journées programmées en fonction de cette rencontre, tâches retardées, tout semble s'écrouler d'un seul coup. Comme pour nous rappeler que la vie, finalement ne tient qu'à un fil. Et les responsables de la RTM ont bien choisi sur quel fil tirer.

L'union cède à la dispersion. Les cafés se vident. La même déception sur tous les visages. Le même sentiment d'abandon ressentis sur tous les pas: l'humiliation vient, à nouveau, de pointer le bout de son nez.

Cette même déception a été ressentie dans bon nombre de villes où la présence marocaine est remarquable. Marseille, Paris, Milan, Montréal, Munich, Amsterdam, sont autant de villes qui ont été témoins de cette scène.

Ce malheureux épisode s'ajoute à la longue liste d'exactions commises par la RTM. Un ras-le-bol collectif commence à s'installer. Un fossé énorme sépare ce Maroc qui les appelle à investir et ce Maroc qui se doit de veiller sur leurs droits. Une attitude schizophrène, aussi incompréhensible qu'injustifiée.

La foule se disperse. Chacun emporte avec lui son lot d'injustice ressentie. Le nouvel an est pour bientôt. On se permet d'espérer.
Espérons...

Jaafar Ammari
Source : Menara