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Blatter: «Moi dictateur? Jamais…»

· Une “task force” pour s’attaquer aux problèmes de corruption
· Marocains, soutenez l’Afrique du Sud!

Joseph S. Blatter, président de la Fifa, reste, malgré tout, dans l’esprit des Marocains, celui qui les a privés de la Coupe du Monde. La Fédération internationale de football a tenu à organiser son 55e congrès dans la ville de Marrakech. Un choix qui devrait calmer les esprits sans aucun doute. Blatter le reconnaît.
Difficile d’ailleurs de lui mettre la main dessus. Le président de la Fifa est un homme affairé. Il est partout, dans les commissions techniques, celles qui s’occupent des finances de cette grande organisation. Sourire aux lèvres, il passe d’une salle à une autre, entouré de ses gardes du corps et n’hésite pas à se prendre en photo avec ceux qui le lui demandent.




- L’Economiste : Organiser votre congrès est une sorte de compensation? Quels ont été les thèmes plus chauds de ce 55e congrès?

- Joseph S. Blatter: Pour la Fifa, organiser le congrès pour la première fois en Afrique, c’est reconnaître un Continent qui a généré tant de joyaux du football international. C’est, je crois, rendre justice à l’Afrique.
Actualité oblige, c’est la multipropriété des clubs qui tient en haleine ce congrès. Le principe 6+5, c’est-à-dire que chaque équipe doit aligner six joueurs éligibles pour l’équipe nationale du pays où le club a son domicile et le respect de la hiérarchie de la pyramide du football.
En deuxième lieu, la Fifa se doit de statuer sur plusieurs problèmes survenus ces dernières années, comme dans l’arbitrage, le transfert des joueurs, la corruption, les paris. Et pour s’attaquer à ces problèmes, nous avons décidé, durant ce congrès, de la création d’une task force qui devra trouver quelques solutions.
J’ajoute aussi que j’attends des membres de notre famille du “fair play”. Qu’ils s’expriment, débattent, formulent des propositions, tout en ayant à l’esprit le principe de solidarité que nous défendons tous. Le football a besoin d’institutions fortes et la FIFA joue ici un rôle moteur. Le congrès cette année grandit avec deux associations candidates, les Comores et le Timor Oriental.

- Justement, le coût des transferts des joueurs est de plus en plus cher. Allez-vous prendre position pour stopper ces enchères?

- En fait, la Fifa a déjà mis en place un règlement qui, justement, nous permet de limiter ces excès. En 2001, nous avons finalisé, après de longues et délicates négociations avec la Commission européenne, une refonte du règlement concernant le statut et les transferts de footballeurs qui régit cette matière. Depuis, beaucoup de choses se sont améliorées. Ce sera aussi parmi les missions de cette task force.

- Les observateurs estiment que jamais le football n’a été aussi proche du business (que le sport) durant votre mandat. Qu’en pensez vous ?

- Je dirais plutôt le contraire. Jamais le business ne s’est intéressé plus au foot qu’aujourd’hui. Pourquoi? Parce que la Fifa a réussi à sauvegarder l’esprit du jeu et parce qu’avec la Coupe du Monde, nous avons créé un événement auquel tout le monde souhaite s’associer.
Et le plus important c’est que la Fifa investit quelque 70% de ses recettes directement à la base du football, de par ses programmes de développement, ses compétitions de jeunes, de femmes, etc.

- Le monopole de la transmission des matchs lors des grandes compétitions footballistiques prive les téléspectateurs, notamment marocains, du spectacle. Le foot en tant que sport populaire, est-il en train de devenir élitiste?

- Ce n’est certainement pas la Fifa qui privilégie une telle approche. Tout au contraire: dans nos contrats, nous avons inscrit le principe que l’audience doit être à son maximum et que certains matchs de la Coupe du Monde, tels le match d’ouverture, les demi-finales, le match pour la troisième place et la finale doivent être diffusés en direct à la télévision terrestre (libre). Par ailleurs, dans les pays des finalistes, les matches de l’équipe nationale doivent également être transmis par des chaînes de TV, libres ou publiques. Par ailleurs, pour 2010, les contrats que la Fifa vient de passer en Europe ont été conclus avec des chaînes publiques.

- On vous accuse d’être dictateur dans votre gestion ?

- Comment? Jamais la Fifa n’a été aussi transparente. Nous nous sommes donnés de nouveaux statuts, un code éthique et un règlement interne qui délimitent les compétences. Toutes les décisions stratégiques sont prises au Comité exécutif ou encore si les statuts le prévoient par le congrès.

- Revenons au Maroc, il a choisi de professionnaliser son championnat. De quelle manière la Fifa peut-elle encourager et encadrer cette expérience?

- Je salue cette initiative qui devrait permettre au football marocain de renforcer sa position importante non seulement en Afrique mais dans le monde entier. La professionnalisation offre aux jeunes talents l’espoir de jouer au haut niveau dans leur propre pays.
C’est certainement une excellente nouvelle pour le football national. La Fédération marocaine de football sait que la porte de la FIFA lui est grand ouverte pour tous les conseils que nous serions honorés de lui prodiguer.

- Qu’en est-il du programme “Goal”?

- Dans notre philosophie, le programme “Goal” est un moteur de développement du football. Il porte de bons résultats et est entré dans une nouvelle ère puisque beaucoup d’associations membres bénéficient déjà d’un deuxième projet, notamment en Afrique. J’ai souvent l’occasion d’inaugurer des projets réalisés grâce à ce programme et je suis heureux de constater que notre idée de départ était la bonne.

- Enfin, que diriez-vous aux Marocains qui pensent que vous les avez privés de la Coupe 2010?

- Je leur dirais d’abord que je comprends leur déception et leur tristesse. Mais, à l’instar de tous leurs frères africains, les Marocains doivent se sentir partie prenante de la Coupe du Monde de la Fifa 2010 qui se jouera en Afrique du Sud car cette Coupe est celle de l’Afrique, de toute l’Afrique. J’ai personnellement beaucoup oeuvré pour que l’événement, qui porte le drapeau de la Fifa, puisse un jour avoir lieu sur le Continent africain. Je souhaite profondément que le peuple marocain s’associe pleinement à cette fête du football et je suis confiant qu’il le fera.

Propos recueillis
par Badra Berrissoule

Source: L'Economiste

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