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Maroc: Nouzha Skalli veut criminaliser la drague

Au département de Nouzha Skalli, on accélère la cadence pour atteindre un objectif principal : traquer le harcèlement sexuel dans les rues.

«C'est choquant pour les femmes que de se sentir comme des proies sexuelles dans les rues». C'est en femme révoltée que Nouzha Skalli, ministre du Développement social, de la famille et de la solidarité, s'insurge contre le harcèlement sexuel dans l'espace public, au point d'en faire un combat personnel. Un projet de loi contre les violences à l'égard des femmes, dont le harcèlement sexuel, est d'ailleurs en cours d'élaboration. «Nous avons dépasse la phase de la concertation. A présent, nous accélérons la cadence pour parvenir à une loi spécifique sur les violences à l'égard des femmes», déclare Nouzha Skalli pour qui incriminer le harcèlement sexuel dans les rues est une priorité dans le cadre de ce projet. Doit-on comprendre par là que le ministère du Développement social veut lancer une traque contre les dragueurs dans les rues ? Madame la ministre explique qu'il y a une différence claire et nette entre drague tout court et harcèlement sexuel : «Notre but n 'est pas de nous opposer aux relations entre les jeunes, mais de protéger la femme quand le harcèlement sexuel dans la rue se transforme en une menace contre elle». La quête de Nouzha Skalli n'est pas des plus aisée d'autant qu'elle appelle à la pénalisation de manière «stricte» du harcèlement sexuel en vue de réprimander les responsables. Et dans ce projet, le ministère du Développement social ne peut pas faire cavalier seul. C'est un travail qu'il mène en partenariat avec le ministère de la Justice, de la Santé mais aussi la sûreté nationale et la gendarmerie royale. «Nous devons convaincre toutes les bonnes volontés sur la nécessité de combattre le harcèlement sexuel», précise la ministre. Il est clair que l'adhésion doit être unanime pour permettre à la locomotive d'avancer et éviter que les réticences y fassent obstacle. Et là, le rôle des autorités est indéniable. Il est prévu, dans un plan d'action, qu'il y ait des unités mobiles de la gendarmerie royale et de la sûreté nationale spécialisées dans la protection des femmes victimes de violences, notamment dans la rue. «Le fait qu'un agent de l'autorité réponde favorablement à une femme qui vient dénoncer une violence conjugale et l'accompagne à la maison représente, par exemple, beaucoup pour la victime», estime Nouzha Skalli. Le département du Développement social compte aussi sur l'implication de l'opinion publique qu'il veut sensibiliser à sa cause. Et ce sont les jeunes qui représentent une cible prioritaire à ce niveau. Nouzha Skalli soutient qu'on doit leur apprendre ce qu'est le harcèlement sexuel pour les informer et lever ainsi l'ambiguïté qui entraîne la confusion entre la drague et le harcèlement sexuel dans la rue. Il s'agit ainsi de dissuader les jeunes et de les mettre en garde contre d'éventuelles poursuites.

Préparer le terrain à cette prise de conscience passe par une stratégie. Au mois de novembre prochain, le département de Nouzha Skalli lancera la nouvelle campagne nationale avec, cette année, une caravane mobile pour expliquer les violences à l'égard des femmes et le harcèlement sexuel. Le projet de loi veut protéger les femmes des violences dans la rue, mais aussi dans le foyer conjugal et au travail. Un atelier de concertation avait été tenu avec les associations et centres d'écoute en vue de prendre en considération leurs doléances à ce propos. L'une de celles-ci est de parvenir à éliminer la nécessité pour les femmes d'apporter des preuves et surtout des témoins oculaires des violences qu'elles ont subi, surtout dans le domicile conjugal. Le but de la loi est de parvenir à terme à protéger la femme dès qu'il y a violence et de prévoir d'autres formes que la répression, notamment en soumettant les responsables à un suivi psychologique. Un changement qui dépendra aussi du changement de la culture.

Problème de priorité

La loi contre les violences à l'égard de la femme prend en considération trois lieux : la rue, le domicile conjugal et le lieu de travail. Il semble que la priorité qu'accorde le département de Nouzha Skalli au harcèlement sexuel dans la rue ne soit pas partagée par d'autres parties. Le réseau contre le harcèlement sexuel estime qu'il faut plutôt se focaliser sur le milieu du travail. «C'est, à mon avis, le plus important. Car les femmes qui sont victimes de harcèlement sexuel au sein de leur lieu de travail vivent dans la peur de perdre leur emploi et hésitent souvent à porter plainte parte qu 'elles ne sont se sentent pas protégées», indique Adib Abdesselam, coordinateur de ce réseau né en 2006. Depuis cette année, les plaintes qui parviennent à ce réseau ne dépassent pas le nombre de 7 annuellement. «Et souvent, ce sont des affaires qui n'aboutissent pas. Les responsables utilisent tous les moyens pour éviter les poursuites».

Leïla Hallaoui
Source: Le Soir Echos

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