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Un détenu de Guantanamo dénonce les tortures subies au Maroc

Un témoignage fort embarrassant pour le Maroc. Mohammed Binyam, détenu à Guantanamo, lève le voile sur les tortures qu'il aurait subies au royaume. Son avocat parle de «pratiques médiévales». Echantillons.

Mohammed Ahmed Binyam, le jeune Ethiopien que les Etats-Unis jugent actuellement devant une cour militaire pour terrorisme, revient au-devant de la scène médiatique. Et le Maroc avec lui, au vu de la gravité des «allégations» de torture relayées par sa défense sur les colonnes de la presse britannique. La dernière des sorties médiatiques en date n'est autre que celle de Clive Stafford Smith, avocat du jeune Ethiopien et président de l'ONG «Reprieve», sur les colonnes de «The New Statesman». Parler de «scandale» serait, au vu des révélations de l'avocat, plus qu'un euphémisme. Jugeons-en !

En 2002, Mohammed Ahmed Binyam, a le malheur de tomber entre les mains des Américains au Pakistan. Il est ensuite remis à la CIA, mais les Britanniques l'informent qu'il sera transféré au Maroc et ont donné toutes les informations, à en croire son avocat, aux Américains pour qu'elles servent de base lors de son «cuisinage». Au Maroc, durant dix-huit mois, rapporte Me Stafford Smith, Mohammed Binyam aurait subi les pires tortures, des «pratiques médiévales» comme les qualifient son avocat : scarifications au scalpel sur les parties génitales, entre autres. «Les tactiques psychologiques étaient pires que la torture physique», écrit l'avocat qui reprend un terrible témoignage de son client. «Etant donné le dilemme consistant à perdre la vue ou la raison, chacun aurait choisi de devenir aveugle plutôt que de devenir fou», raconte le jeune Ethiopien à son avocat. Et le reste est encore plus insupportable.

Selon le récit du détenu de Guantanamo, au Maroc, il a découvert une autre pratique de torture psychologique. Il a tout simplement été obligé d'écouter de la musique, volume au maxi­mum et écouteurs plaqués sur ses oreilles. Ses tortionnaires ont du «goût» en plus et recourent à des morceaux de choix : quand ce n'était pas du «Meat Loaf», c'était du «Aerosmith» !

Pour compléter la panoplie, Mohammed Ahmed Binyam parle également d'autres pratiques de torture, dont la privation de sommeil, les températures excessives alternées avec d'autres, qui le sont nettement moins et, pour finir, des administrations forcées de drogues. Des «allégations» pareilles, le Maroc en a déjà fait l'objet, mais qu'en est-il pour le cas Binyam ? Le problème pour Rabat, qui a toujours nié avoir réceptionné des vols de la CIA et donc des détenus catalogués «combattants ennemis» par les USA, est que de telles pratiques vont tout simplement être dévoilées publiquement. En effet, un tribunal Britannique vient de donner raison, contre le gouvernement, aux avocats de Mohammed Binyam qui demandaient de lever le secret sur les tortures subies par leur client au Maroc pour qu'il avoue être un terroriste. Ces documents doivent de ce fait être versés au procès qui se tiendra prochainement devant un tribunal militaire américain.

C'est éventuellement à ce moment-là que l'on pourra finalement, et aussi, savoir si les pratiques de tortures étaient «sous-traitées» aux services Marocains ou si le Maroc ne faisait qu'office de plate-forme à cette autre forme de «délocalisation». Mohammed Ahmed Binyam, ingénieur en électricité et résident de manière légale en Grande-Bretagne où il travaillait comme technicien de surface (nettoyeur), risque la prison à vie au vu des accusations portées contre lui par les Américains. Le Pentagone le soupçonne d'avoir planifié, aux States, des attentats à la «bombe sale». Ses avocats comptent sur son «séjour marocain» pour le tirer d'affaire.

Mohammed Boudarham
Source: Le Soir Echos

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