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Pays-Bas: Quand juifs et musulmans luttent ensemble

Alors que les tensions communautaires ont fortement crû aux Pays-Bas depuis l'assassinat du réalisateur Theo van Gogh au nom de l'islam radical, début novembre, juifs et musulmans d'un quartier populaire d'Amsterdam veulent poursuivre un dialogue contre "un fossé d'ignorance".

L'histoire a commencé par un choc. Le 4 mai 2003, la commémoration de la Seconde guerre mondiale et de l'Holocauste dans le quartier du Baarsjes est perturbée par un petit groupe d'adolescents d'origine marocaine. Certains jouent au football avec les gerbes et crient des slogans anti-juifs.

Plusieurs juifs orthodoxes se font insulter en sortant de la synagogue Sjoel West.

Le Baarsjes est un des quartiers les plus cosmopolites de la capitale. La moitié des habitants y est d'origine étrangère, principalement marocaine et turque.

Comme dans beaucoup de grandes villes européennes, le conflit israélo-palestinien a tendu les relations entre les communautés juives et musulmanes, mais dans ce quartier certains ont refusé d'en rester aux imprécations, aux peurs et aux stéréotypes.

"Nous sommes allés voir les représentants de la communauté marocaine, notamment ceux de la première génération pour leur dire qu'il fallait réagir", raconte Erwin Brugmans, un juif orthodoxe toujours coiffé de sa kippa."Ils étaient choqués et nous disaient, +ces jeunes, nos jeunes ont déraillé+. Ils ont voulu nous aider".

"Il ne faut pas oublier que le Maroc compte une forte communauté juive et que les immigrés d'ici ont vécu en bonne harmonie avec eux", ajoute cet homme posé et souriant qui vit dans le quartier depuis des dizaines d'années.

Erwin Brugmans, les animateurs des centres de loisirs pour jeunes et les représentants de la communauté musulmane commencent à se rencontrer régulièrement.

En 2004, juifs, musulmans et autres Néerlandais du quartier commémorent ensemble la Seconde guerre mondiale et l'Holocauste. Les trois mosquées du quartier ont offert des gerbes.

"Les membres de notre communauté étaient surpris, ils m'ont dit qu'ils n'auraient jamais cru cela possible", raconte M. Brugmans.

Pour la première fois, les combattants marocains sont également mis à l'honneur. "Pour nous, c'était très important, aucun livre d'histoire n'en faisait mention", souligne Habib, un animateur d'origine marocaine qui participe activement à ce dialogue.

A l'automne, les équipes de football du quartier, composées en majorité de jeunes d'origine marocaine, reçoivent leurs homologues juives pour un tournoi juif-marocain. "Tout le monde nous prédisait des incidents mais tout s'est déroulé à merveille", souligne M. Brugmans.

Tous espèrent renouveler l'expérience. Habib souhaite des rencontres entre écoliers de toutes origines, "juive, musulmane, chrétienne, athée" pour apprendre à mieux se connaître.

"Les jeunes voient les images des Palestiniens et des souffrances quotidiennes à la télévision, ils s'identifient à eux. Leur image des juifs se limite souvent aux soldats israéliens", ajoute-t-il.

"Il y a un fossé d'ignorance de part et d'autre", renchérit M. Brugmans.

Il pointe pourtant les similitudes de deux communautés parfois confrontées aux mêmes réactions racistes de certains Néerlandais.

Alors que le meurtre de Theo van Gogh a entraîné des représailles contre les musulmans, aucune mosquée n'a été profanée dans le Baarsjes.

"Le dialogue régulier instauré entre les communautés a porté ses fruits et les gens se connaissent, ce qui évite les amalgames", soulignent Frank et Mehmed, deux travailleurs sociaux qui stimulent les initiatives des habitants.

Source : AFP ©

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