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L'immigration clandestine touche de plus en plus les enfants marocains

L'immigration clandestine ne se limite plus aux adultes. Elle séduit également bon nombre de mineurs. Ils sont quelque 4.441 enfants marocains hébergés aux centres d'accueil d'Espagne. Mais, en réalité, le nombre des mineurs qui ont réussi à traverser le détroit est plus grand. «Selon les statistiques des Espagnols, le pourcentage augmente de plus en plus», explique Nouzha Chekrouni, ministre déléguée chargée de la Communauté marocaine résidant à l'étranger.

Cette amère réalité n'est plus considérée comme un nouveau visage de la migration clandestine. Le phénomène devient un véritable fléau social qui interpelle les responsables gouvernementaux des deux pays et la société civile. Les discussions bilatérales ont déjà pris un chemin considérable.

«Le gouvernement a essayé de traiter la situation à travers l'élaboration d'un cadre juridique. Le Maroc et l'Espagne ont, en effet, signé un mémorandum d'entente afin de garantir la protection des droits des mineurs et de leur dignité et d'éviter les répercussions négatives du phénomène sur la réputation du Maroc», signale Nouzha Chkrouni.

Mais, l'image du Maroc n'est-elle pas déjà noircie vu l'ampleur du fléau?
Depuis quelque temps, l'Espagne a demandé de rehausser le niveau du cadre juridique du simple mémorandum d'entente à une convention entre les deux pays.

Le projet est dans la phase d'étude. On a également signé un protocole précisant la procédure du rapatriement des mineurs non accompagnés. Il définit, en outre, les mesures qu'il faut prendre de la part du comité spécial chargé d'étudier la situation des enfants mineurs pour juger les cas de ceux qu'il faut garder dans les centres et ceux qui doivent être rapatriés.

Une commission marocaine a déjà visité en 2005 les centres d'accueil espagnols. Il s'agit de deux centres un à Madrid et l'autre à Grenade.
«Elle a constaté de plus près les bonnes conditions d'hébergement et de formation».
Ainsi, après plusieurs négociations, l'Espagne a eu gain de cause. Les pressions exercées sur le Maroc ont donné les fruits escomptés. L'Espagne espère au plus vite avoir sur son territoire zéro mineur marocain. Or, ce n'est pas une tâche facile.

On veut prévenir l'immigration clandestine des mineurs en renforçant le contrôle des territoires, en luttant contre les réseaux organisés impliqués dans le phénomène, en adoptant des programmes de soutien au développement et en créant des centres d'accueil sociaux spécialisés. La sensibilisation des familles s'avère aussi d'une plus haute importance.

Les responsables marocains ont demandé aux chefs consulaires en Espagne de vérifier l'identité de chaque enfant quand ils recevront les demandes de rapatriement. Chaque cas devrait être étudié en élaborant un dossier complet contenant des informations sur la situation juridique, sanitaire et sociale de l'enfant. Il est également essentiel d'évaluer les chances de l'enfant de s'intégrer au pays d'accueil ou au celui d'origine. Le bilan de l'étude devra être envoyé au ministère pour prendre la décision convenable selon les conditions du mémorandum d'entente.

Au cours des prochaines rencontres avec la partie espagnole, on proposera un projet de création des centres d'accueil au Maroc. Le malheur est que ces enfants ne sont réclamés par personne à cause de la pauvreté de leur famille. Ce qui pose bon nombre de problèmes. Aussi, les enfants rapatriés seront-ils mis sous la responsabilité des services sociaux au Maroc.

Le fléau de la migration clandestine des mineurs marocains est alarmant. Ceux qui ont réussi à se fondre dans la société espagnole sont confrontés à de sombres destinées. Ils sont aujourd'hui exploités par des trafiquants. Certains d'entre eux ont réussi à entrer dans d'autres pays de l'Union européenne et subissent les pires humiliations.

Une étude sur le phénomène a été réalisée. C'est un premier pas sur la voie de la réflexion sur le phénomène. L'enquête s'est faite auprès de quelque 300 enfants en Espagne et au Maroc. Elle est le fruit d'un partenariat entre l'Unicef-Rabat, l'association marocaine Attadamoun, Junta de Andalucia, l'ONG espagnole «Fondation Jaume Bofill».

Elle s'avère d'une plus haute importance car elle dresse les différents profils des mineurs non accompagnés et soulignent leurs divers problèmes.
Elle fait ressortir que les migrants marocains mineurs ne sont pas seulement en Espagne.

Ils sont présents dans beaucoup d'autres pays, notamment les Pays-bas, la Belgique, l'Italie et la France. On ne peut pas définir facilement leur nombre.
Ils sont essentiellement des garçons dont la moyenne d'âge est de 16 ans. On note même des enfants de neuf ans. Rares sont les filles mineures qui recourent à l'immigration. Mais, le rapport signale qu'elles sont on ne peut plus vulnérables à l'exploitation sexuelle et économique. Certaines travaillent comme des petites bonnes dans des conditions désastreuses. La méthode de leur immigration diffère de celle des garçons. Elles passent, en effet, souvent avec leurs parents cachées dans des voitures.

La plupart des migrants mineurs proviennent des quartiers périphériques des grandes villes marocaines ou des zones rurales les plus pauvres. Bon nombre d'entre eux ont abandonné l'école au cours de la sixième année du primaire ou la première année du secondaire. Les migrants doivent passer par de nombreux organismes, institutions, réglementations et autorités compétentes. Quelques-uns déclarent que la possession de leurs documents leur a pris de 1 à 7 ans. Malgré l'obtention des papiers, à 18 ans, on doit chercher une offre de travail pour pouvoir garder le permis de séjour.

La réalité est affligeante. Les enfants marocains méritent d'être protégés. C'est au Maroc qu'il faut commencer le travail pour prévenir le fléau.

Différentes raisons de la migration des mineurs
Différentes raisons poussent les plus jeunes à émigrer. La pauvreté est la première cause. Le divorce, la violence familiale et le second mariage sont également des caractéristiques communes à plusieurs mineurs. Les enfants de la rue figurent aussi dans la catégorie des mineurs clandestins.

Tétouan, Chaouen, Larache, Fnidek, Ksar Lekbir, Souk Larbaâ, Nador, Al -Hoceïma, Ouezzane, Casablanca, Rabat, Kénitra, Fès, Meknès, Béni Melall, Marrakech et Zagoura sont autant de lieux de provenance de cette catégorie de personnes. Tanger est le point principal d'origine des migrants mineurs en Espagne (62,58 %). Cette ville est aussi le principal point de sortie des mineurs qui traversent le détroit.

Les ports de Nador et Melilia, celui de Casablanca et Tarfaya constituent également des portes de passage des frontières. Ce sont des zones de commerce international, de trafic aérien, maritime ou terrestre avec un grand trafic des marchandises. Tarfaya est un passage particulier où l'on utilise des pateras en direction des îles Canaries.

Généralement, l'adolescent garde le contact avec sa famille et quelques garçons envoient même de l'argent à leurs parents. Dans la plupart des cas, les familles ne sont pas au courant de l'intention de leurs enfants d'émigrer clandestinement.

Certains parents reconnaissent " un consentement tacite car ils savaient que leurs fils descendaient au port dans ce dessein. Les petits frères sont considérés toujours comme des candidats potentiels de la migration clandestine.

Jihane Gattioui
Source: Le Matin

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