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Les "années de plomb" au Maroc auraient fait 592 morts

Les répressions exercées au Maroc durant les décennies 1960 à 1990 ont entraîné la mort de 592 personnes, fait savoir l'Instance équité et réconciliation (IER) chargée par l'Etat d'examiner les exactions commises durant la période dite des "années de plomb".

Toutefois, l'Association marocaine des droits de l'homme (AMDH), principal organisme indépendant du pays en ce domaine, a estimé que le résumé des investigations de l'IER n'allait pas assez loin, notamment dans l'identification des responsables d'abus susceptibles de faire l'objet de poursuites.

D'après l'AMDH, environ 3.000 personnes ont été tuées durant la période considérée.

Le rapport de l'IER, qui a été créée sur l'initiative du roi Mohamed VI, précise que 322 des victimes recensées ont été abattues par les forces gouvernementales au cours de manifestations, dont une en 1981 à Casablanca lors d'émeutes contre la hausse des prix des denrées alimentaires.

Reuters a obtenu vendredi un résumé du rapport de 700 pages de l'IER qui a été remis au roi. Celui-ci a ordonné qu'il soit rendu public rapidement pour souligner sa volonté de renforcer la démocratie et le respect des droits de l'homme.

L'IER, qui a reçu 16.861 dossiers à étudier, a confirmé au moins 9.779 cas d'atteintes aux droits de l'homme allant des violences en détention aux exécutions extra-judiciaires, en passant par les "disparitions forcées", les "exils forcés" ou les sévices sexuels.
"L'IER a par ailleurs pu déterminer que 174 personnes sont décédées en cours de détention arbitraire ou de disparition entre 1956 et 1999 (...) mais n'a pas pu déterminer les lieux d'inhumation", ajoute-t-elle.


MORTS EN DETENTION

Les auteurs de l'enquête notent que les décès en détention ont diminué à mesure que le royaume évoluait vers plus une grande tolérance envers les dissidents vers la fin des années 1990, avant la mort du roi Hassan II en 1999.

Selon le rapport, 109 prisonniers sont morts en prison dans les années 1970, chiffre qui tombe à neuf durant la décennie suivante et à deux au cours des années 1990.

L'IER laisse entendre qu'elle n'a pas fait la lumière sur tous les cas de violation présumés, notamment en ce qui concerne le sort de dizaines de dissidents portés disparus, dans le cadre de l'enquête qu'elle a entamée en janvier 2004 et achevée en novembre dernier.
"Enfin, l'IER a acquis la conviction que 66 autres cas de victimes qu'elle a analysés rassemblent les éléments constitutifs de la disparition forcée et considère que l'Etat a l'obligation de poursuivre les investigations entamées par ses soins afin d'élucider leur sort", ajoute-t-elle.

Mohamed VI, que d'anciens ennemis du régime autoritaire de son père appellent le "roi démocrate", a chargé l'IER de localiser des centres de détention ainsi que les dépouilles de victimes, de porter assistance aux survivants et de mettre en oeuvre des formules d'indemnisation.

Selon le rapport, l'IER a recommandé que des indemnités soient versées à 9.280 victimes, dont 1.895 personnes qui recevront des allocations supplémentaires pour pertes d'emplois ou d'autres activités professionnelles.

L'AMDH juge pour sa part les chiffres de l'IER éloignés de la réalité. Son porte-parole Abdella Abdeslam a dit s'être attendu à des résultats incomplets parce que le pays n'a selon lui pas encore mis fin aux abus. D'après l'AMDH, 1.500 personnes furent tuées au cours de manifestations le 21 mars 1965, et de 500 à mille lors d'autres troubles en 1981.

L'IER exhorte les autorités à poursuivre les réformes, en favorisant en particulier l'indépendance de l'appareil judiciaire et en mettant fin à l'impunité pour les responsables de la sécurité.

Source : Reuters

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