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Maroc-Venezuela : La Longue histoire d'un désamour

Entre le Maroc et le Venezuela, les relations étaient à leur plus bas depuis plusieurs décennies. Jusqu'au jour où le vase a débordé avec la fermeture de l'ambassade marocaine à Caracas. Retour sur un bras de fer qui dure depuis au moins 1982.

Mi-janvier. Le Maroc décide de fermer son ambassade à Caracas pour la «déménager» vers la République Dominicaine. La réaction fait suite à la nomination, le 10 du même mois, d'Hector Michel Mujica en tant qu'ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire auprès de la RASD. «Cette décision fait suite à l'hostilité croissante des autorités vénézuéliennes à l'égard de la question de l'intégrité territoriale du Royaume du Maroc et aux récentes mesures de soutien à la pseudo-RASD prises par le gouvernement de ce pays», réagissait à l'époque le ministère des Affaires étrangères. Mais ce n'était là que la goutte qui a fait déborder le vase. A l'exception de l'Algérie et de l'Afrique du Sud, le Venezuela, et depuis longtemps, fait figure de principal soutien à la RASD, non seulement dans les pays d'Amérique latine, mais au niveau mondial et dans tous les forums internationaux. «Malgré toutes les tentatives pour amener le Venezuela à prendre une position neutre et équilibrée au sujet de la question de l'intégrité territoriale du Maroc, le gouvernement vénézuélien a adopté, de manière systématique et croissante, des positions ouvertement hostiles aux intérêts supérieurs du Royaume», explique une source au sein de la diplomatie marocaine. Faits et déclarations datés à l'appui, un document du ministère des Affaires étrangères recense les manifestations d'hostilité au Maroc de la part des dirigeants vénézuéliens et il en ressort, encore une fois, que c'est le seul pays (à part l'Algérie) qui «chouchoute» la RASD de cette manière.

Le Venezuela était d'ailleurs l'un des. premiers Etats à reconnaître la RASD en août 1982, soit presqu'au moment où le Maroc claquait la porte de l'Union Africaine pour les mêmes raisons. Hugo Chavez, lui, et depuis son accession, ne rate aucune occasion pour à la fois glorifier «la lutte du peuple sahraoui» et promettre de «faire le maximum» pour soutenir ce dernier. Même l'émission dominicale «Allo M. le Président», animée par le même Chavez, revient sur la «lutte du peuple sahraoui». Il est d'ailleurs le seul chef d'Etat au monde à embarquer, abord de l'avion présidentiel, des responsables du Polisario et à les associer à ses tournées dans son pays. En mars 2006, les choses dégénèrent d'une manière sans précédent. Le président vénézuélien refuse tout simplement de recevoir Mohamed Benaïssa, ex-ministre des Affaires étrangères et Khellihenna Ould Errachid, présidentd u Corcas, en tournée dans la région pour exposer l'offre marocaine d'autonomie pour les régions du Sahara. Mais le tapis rouge est déroulé aux responsables de la RASD chaque fois que ces derniers, soit assez souvent, se rendent au Venezuela. C'est surtout le cas pour Mohamed Abdelaziz, qui multiplie les déplacements à Caracas : en septembre 2004 avec la signature de plusieurs «accords de coopération», mais aussi et récemment, en août 2008.

Pendant de cet engouement pour les responsables du Polisario, les officiels vénézuéliens de haut rang font partie des rares responsables gouvernementaux du monde à se rendre dans les camps de Tindouf ou même pour les fameuses célébrations de Tifariti. C'est notamment le cas pour les ministres de la Santé et de l'Energie et des mines. Et, cerise sur le gâteau, Ahmed M'birik est accrédité le 19 août 2008, à la place de Elhaj Ahmed, en tant qu'ambassadeur extraordinaire et plénipotentiaire à Caracas. «Des escarmouches que Rabat ne pourrait continuer à tolérer et il fallait une réaction de fermeté», explique notre interlocuteur au ministère des Affaires étrangères. Pour autant, ajoute la même source, cela ne signifie nullement une «rupture diplomatique», mais une réaction à «une hostilité qui a eu un impact négatif sur l'ensemble des volets de coopération entre les deux pays».

Quid du timing ?

Plusieurs milieux, médiatiques, mais aussi politiques, ont reproché à Rabat le timing de sa décision de retira son ambassade de Caracas juste quelques jours après celle de Hugo Chavez d'expulser l'ambassadeur israélien suite à la sauvage offensive sur Gaza. «Il ne faut pas mélanger les genres», réagit une source au sein de la diplomatie marocaine. Et les raisons avancées ne manquent pas de sérieux. Le ministère des Affaires étrangères est tenu d'observer un calendrier diplomatique mis en application depuis fin novembre
dernier et consistant en l'ouverture de nouvelles ambassades la nomination de nouveaux ambassadeurs et des ajustements a apporter aux structures existantes. La décision marocaine concernant Caracas obéit d'ailleurs à ce même calendrier. Du reste le Maroc, au plus haut niveau, a réitéré que son engagement, depuis toujours, en faveur de la Palestine et des Palestiniens ne saurait être remis on cause. Pour preuve, les immenses efforts, multiformes, de solidarité lancés depuis le début de l'offensive israélienne contre Gaza et ses populations. Quant a la fermeté marocaine, elle n'a. pas concerné qu'un pays comme le Venezuela. Mais aussi un pays allié comme l'Arabie Saoudite. Lors de la dernière saison du Haj, Rabat avait mis en garde contre tout traitement de faveur réserver à Mohamed Abdelaziz parti à la Mecque avec un passeport diplomatique algérien. Riad avait répondu que le chef du Polisario était traité en tant que simple pèlerin et qu'il ne serait reçu par aucun officiel saoudien. L'incident avait été clos en quelques heures et quelques coups de téléphone.

Mohammed Boudarham
Source: Le Soir Echos

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