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Affaire Al Watan. Les militaires demandent une grâce royale

Leur procès est passé presque inaperçu, les projecteurs étant restés braqués sur un autre qui se tenait au même moment à Casablanca, celui de Hormatallah et Ariri. Eux, ce sont les 6 militaires de "l'affaire Al Watan".

Les 6 militaires poursuivis dans le cadre de l'affaire Al Watan entament leur 16e mois d'emprisonnement. Leurs conditions de détention sont pour le moins «insupportables», pour reprendre les termes d'un militaire incarcéré. Ils sont, certes, traités avec égard par l'administration du pénitencier et respectés par les autres pensionnaires de la prison Zaki de Salé. Ils demeurent, néanmoins, encellulés avec des détenus de droit commun, «des criminels et des brigands de tout acabit», précise une source proche du dossier. Une seule chance pour échapper à ce calvaire : une grâce royale et une «improbable» réhabilitation.

Du fond de leur cellule à la prison de Salé, les militaires incarcérés dans le cadre de l'affaire Al Watan réclament aujourd'hui cette grâce. Anonymement, «parce que c'est plus prudent», affirment-ils. «Nous sommes contraints non seulement d'accomplir nos peines (5 années pour deux d'entre eux et deux ans pour les autres : ndlr) mais également d'affronter la vie à notre sortie sans rien», confie un militaire qui parlait au nom de ses six collègues. Mais ces derniers ne se font pas trop d'illusions. Des occasions d'intervention royale, il y en a eu beaucoup entretemps. Une quinzaine de mesures de grâce, de remises de peine ou de commutations de peine pendant les 16 derniers mois et «à aucune occasion leur dossier ne fut à l'ordre du jour», déplore une source proche du dossier, qui rappelle le caractère expéditif du procès. L'affaire avait en effet été examinée et jugée le même jour. De même, «le tribunal a choisi le recours à l'article 178 du code de justice militaire parce qu 'il n'avait pas de motifs de jugement apparents, encore moins de preuves concrètes», ajoute cet avocat. «Ces militaires ont été des boucs émissaires, pour la plupart, ni plus ni moins. Et si ce n'est le cas, cela frise le règlement de compte», conclut notre avocat.

Les six militaires ont finalement été radiés des rangs et privés du droit à la pension de retraite. Et cela après une longue carrière dans l'armée, 38 ans pour Mohamed Fadil par exemple, lauréat de l'Ecole de guerre (France) et ancien directeur de l'Ecole navale de Casablanca. «Le seul grief qu'on lui reproche, c'est d'avoir bu un café avec le journaliste d'Al Watan Al An. Et il en a pris pour deux ans», affirme notre source. «Il se retrouve aujourd'hui, à 58 ans, dans une prison avec des repris de justice et des criminels de toutes catégories», ajoute la même source. C'est également le cas de l'ex-patron des renseignements militaires au niveau du Grand Casablanca, le colonel M'barekLemmou, «auquel l'on reproche d'avoir été pris en photo à découvert parle même journaliste. Et il en a pris pour deux années». Le même sort a été réservé au colonel Abdelmajid Jouti, de la brigade des parachutistes, qui a participé à la guerre du Sahara et à la première guerre du Golfe. Cet officier de 42 ans se retrouve, après 26 ans de service, en prison pour deux années «pour avoir été abordé par le journaliste, dans les couloirs de la wilaya de Casablanca un jour où il venait de recevoir une distinction». Cela, sans citer l'adjudant de la gendarmerie, Jamal Khadri, qui a écopé de la même peine «pour être un voisin du directeur de l'hebdomadaire». Le capitaine Mohamed Mouaji, celui qui a été accusé d'avoir remis le document incriminé au journaliste, est enfin «un déséquilibré mental», selon l'un de ses collègues emprisonnés. «Son avocat avait demandé sa relaxation pour expertise médicale, mais le tribunal n 'a pas fait cas de sa requête». Résultat, cinq ans de réclusion.

Tahar Abou El Farah
Source: Le Soir Echos

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