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Politique énergétique: le Maroc appelé à plus de vigilance

Jamais la problématique de l’énergie et du pétrole en particulier n’a été autant au centre des inquiétudes des gouvernements, des collectivités et des consommateurs. Aujourd’hui, le prix du baril flirte avec les 150 dollars contre 70 il y a un peu plus d’un an. Ce qui exacerbe les tensions sur la production dans un contexte de forte demande mondiale. Et les marchés tentent tant bien que mal d’ajuster l’équilibre offre/demande par les prix.

Pour élucider les perspectives du marché mondial et national, les besoins en énergie et les réserves disponibles, l’Institut Samir du pétrole a organisé, mardi dernier, une conférence-débat autour de la géopolitique du pétrole. Experts, analystes, pétroliers, distributeurs, industriels, chercheurs et universitaires… ont répondu nombreux à cette rencontre d’actualité. D’autant plus qu’elle a coïncidé avec le premier jour de l’application de la hausse sur le carburant, le 1er juillet. Problématique des prix pétroliers, conséquences sur les équilibres au Maroc et dans le monde, perspectives de croissance… autant de thématiques qui ont été décortiquées pour expliquer les enjeux géostratégiques de l’heure.
D’emblée, le président de la Fédération de l’énergie a planté le décor en présentant la situation au Maroc. Pour Moulay Abdellah Alaoui, la facture énergétique pèse lourdement sur les équilibres financiers et économiques du Maroc: «Les achats de pétrole représentent plus de 30% des importations globales». Le plus inquiétant est la facture de la subvention.

«Les subventions accordées pour le soutien des prix intérieurs des produits pétroliers avoisinent l’équivalent des dépenses d’investissement du Budget général», lâche le président de la Fédération de l’énergie. En clair, les contraintes pèsent lourdement sur la balance des paiements. La dernière hausse appliquée sur le carburant s’explique en partie par ces contraintes financières. Mais jusqu’à quand le système actuel des subventions pourra encore tenir?
Pour Jean-Pierre Favennec, spécialiste de l’énergie et directeur du Centre économie et gestion de l’Institut français du pétrole (IFP) France, la hausse survenue sur le prix du gasoil 350 PPM génère un écart de prix avec le gasoil 10.000 PPM. D’où le risque pour beaucoup d’automobilistes à faible pouvoir d’achat de switcher vers le gasoil le moins cher, lequel est plus polluant.

Une chose est sûre, selon Favennec, la subvention ne peut durer ad vitam aeternam. Pour le cas du Maroc, il est appelé, de l’avis de l’expert, à tenir compte de trois paramètres: il s’agit en premier lieu de prendre en compte les contraintes actuelles, les analyser et aider le consommateur à s’y adapter. Ensuite, prévoir le long terme avec des investissements massifs dans la production de l’énergie et, enfin, faire de la pédagogie autour de la cherté des prix, la rationalisation de la consommation et la contrainte de la politique de subvention. L’enjeu est de faire répercuter sur le consommateur les vrais prix, tout en l’aidant à dépasser les difficultés passagères. Mais attention, le dispositif d’aide ne doit pas durer plus longtemps.

«Parallèlement, le Maroc pourra rendre rentable l’exploitation de certains gisements», suggère le président de la Fédération de l’énergie. Sur ce registre, de sérieuses études et stratégies sont en cours. Compte tenu du peu de forages que compte le Maroc en eau profonde, Mly Abdellah Alaoui fait allusion à la possibilité de développer une «destination attractive pour des investissements pétroliers sur les côtes atlantiques». Mais quid des sources d’énergies alternatives? Nombreux sont ceux qui préconisent le recours à des investissements dans la culture des biocarburants. A leur tête, la Banque mondiale. Récemment, des experts américains ont identifié le Maroc comme zone potentiellement porteuse pour le développement des biocarburants, notamment à travers les cultures du maïs. Pour Saïd Mouline, spécialiste de questions liées à l’environnement et à l’énergie, «il y a énormément de niches à explorer dans des zones arides». Chose que n’admet pas la Fédération de l’énergie. «L’énergie est une affaire très sérieuse», avertit le président Alaoui. Sur cette question précise, l’on se dit intraitable à la fédération. Cette dernière a pris une position nette «anti-biocarburant». Elle tient comme argument que le premier besoin de l’homme est d’abord alimentaire. «Nous avions raison de résister aux pressions des experts», se félicite Alaoui. Mais pour Mouline, qui partage ce souci agroalimentaire, «il y a des zones arides, des cultures comme que les cactus et les résidus du bois qui n’ont aucun impact et ne concurrencent pas forcément l’agroalimentaire».

Schistes bitumineux…
Depuis longtemps, des experts appelaient au recours aux schistes bitumineux. Le premier scénario qui tablait sur cette source énergétique prévoyait son utilisation lorsque le prix du baril a atteint 50 dollars. Or, à près de 150 dollars le baril, la piste des schistes tarde à être exploitée. Pour un responsable à l’Office national des hydrocarbures et des mines (Onhym), cette alternative au Maroc bute sur deux problèmes: technologique et environnemental. A part le manque de matériels approprié, l’extraction de l’huile de pétrole est très onéreuse. De plus, le volet technologique n’est pas encore assez développé. Autre obstacle majeur, le traitement des déchets énormes que génère l’extraction.

Consommation: Le grand dilemme
La consommation moyenne d’énergie par habitant des pays industrialisés est aujourd’hui 20 fois supérieure à celle des pays en développement. Dans les prochaines années, la demande d’énergie pourrait quadrupler dans les PVD, annonce-t-on auprès de la Fédération de l’énergie. Et ce, du fait de l’accélération de la croissance démographique, de l’urbanisation et de l’industrialisation. Désormais, la consommation énergétique est un indicateur indéniable de développement économique. En même temps, les pays en voie de développement sont appelés à maîtriser leur demande d’énergie et faire plus d’économie.

Source: L'Economiste

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