Antécédents
1939. Naissance à Casablanca.
1953. Intègre le mouvement de résistance, emprisonné pendant une année.
1954. Débute dans le théâtre.
1967. Naissance du personnage de Abderraouf.
2006. Entame une nouvelle tournée avec “Imta Yji L’moudir”
Smyet Bak ?
Abdelaziz.
Smyet mok ?
Milouda.
Nimirou d’la carte ?
G 30 360.
Tout à l’heure, au téléphone, vous vous êtes présenté sous le nom de Abderraouf. Abderrahim, c’est qui alors ?
C’est pour faire court. J’aurais dit Abderrahim Tounsi, vous ne m’auriez peut-être pas reconnu tout de suite.
Vous repartez en tournée avec “Imta Yji L’moudir”. Vous croyez-vous encore capable de faire rire les gens ?
Nous avons déjà joué à Casablanca, Kelaât Sraghna, Settat et Berrechid. Croyez-moi, la réaction du public à mes gags n’a pas changé. Ce qui m’a fait le plus plaisir, c’est que des enfants riaient aussi dans la salle. Je pouvais les entendre, ils prenaient réellement du bon temps alors qu’ils appartiennent à une génération qui ne m’a pas connu. Je me suis éclipsé durant une dizaine d’années. Les passages de quelques minutes à la télévision ne me suffisaient pas. J’ai besoin de temps pour communiquer avec le public. Avec cette pièce qui fait une heure 15, j’ai plus de 45 minutes pour moi tout seul.
Et dites-moi, il n’a pas vieilli, Abderraouf ?
La voix a un poids considérable. De Funès a joué jusqu’à sa mort parce qu’il a su garder la même voix et les mêmes grimaces. C’est sa voix qui a sauvé Abderraouf également. C’est 90% du personnage. Après, il y a cet aspect d’idiot intelligent, aux mille et une conneries toujours appréciées par le public.
Vous supervisez toujours tout vous-même, du scénario à la billetterie ?
Non, c’est révolu maintenant. Je le faisais parce que j’avais des charges et des impôts à payer et que je n’étais pas entouré que par des gens honnêtes. Je devais donc surveiller ma caisse. Aujourd’hui, j’ai mes deux fils qui font ça pour moi.
En 1971, que s’est-il passé pour que vous troquiez la blouse bleue de la Somaca contre le seroual et le papillon de Abderraouf ?
J’avais déjà créé le personnage et j’étais trop sollicité. Le public tenait beaucoup plus à moi que la Somaca qui, de toute manière, n’a eu aucun problème pour me remplacer. Pour chaque fête, j’étais sollicité par les gouverneurs, la télévision, etc.
Vous étiez un humoriste makhzénien, quoi !
Il y a plusieurs manières de faire rire les gens. On n’est pas toujours obligé d’insulter pour plaire au public. Bourvil n’a jamais insulté personne. Généralement, les humoristes qui s’attaquent aux personnages publics ne font pas long feu parce qu’à la longue, ça devient lassant.
La politique ne vous a jamais rien dit ?
J’ai appartenu à la résistance quand j’ai senti que c’était un devoir national. A ma sortie de prison, on m’a délivré une carte du parti de l’Istiqlal contre le versement d’un dirham par mois. Quelque temps après, j’ai eu la carte du parti de la Choura, l’ennemi juré de l’Istiqlal. J’assistais aux meetings où les uns tapaient sur les autres. Chaque fois que je me déplaçais pour une représentation, je sortais l’une des deux cartes selon qui était majoritaire dans la ville. Je pouvais ainsi avoir toutes les facilités nécessaires. J’ai alors compris que la politique est un jeu.
Comment est né Abderraouf ?
Ce personnage est un don de Dieu. Je faisais partie d’une troupe de théâtre amateur. Une fois, j’ai gardé chez moi tous les costumes de la troupe et je me suis amusé à en essayer certains. Devant le miroir, j’ai commencé à mimer le personnage idiot que m’a inspiré un costume en particulier. La voix que je prenais pour jouer me plaisait également. J’ai alors composé le premier sketch qui a bien marché. C’est finalement le costume qui a créé Abderraouf.
Vous prévoyez d’effectuer une tournée au Sahara, c’est courageux ça …
Ce n’est pas la première fois. En 1980, j’avais écrit à l’Etat major des Far pour demander l’autorisation de donner des représentations spéciales pour l’armée. C’étaient des années difficiles ( la guerre avec le Polisario). J’ai eu le feu vert et un hélicoptère m’a amené à Dakhla, Boujdour, Smara, Bir Anzarane, Boucraâ ,Haggounia, Geltat Zemmour. Le seul village où je n’ai pas pu partir est Zag, où il y avait des combats.
Driss Bennani
Source : TelQuel