Le Maroc d’après les élections législatives 2007 serait-il gouverné par les islamistes ? Tout porte à le croire. Plusieurs spécialistes prévoient une « razzia » du PJD (Parti de la Justice et du Développement) lors de ces élections, les deuxièmes depuis l’intronisation du Roi Mohamed VI.
Déjà, lors des élections législatives du 27 septembre 2002, les résultats obtenus par la seule formation politique islamiste reconnue à l’époque (actuellement elles sont deux) le PJD, étaient des plus spectaculaire. Et elle n’a présenté que 56 listes dans les 91 circonscriptions régionales, répondant ainsi à une requête presque explicite du néo-Makhzen. Quand bien même, ils ont raflé pas moins d'une quarantaine de siéges au niveau de la chambre des représentants.
Possèdent-ils autant de partisans parmi leurs rangs ? Pas tout à fait. Les islamistes du PJD ont tout simplement profité d’un “vote-sanction" contre les formations politiques traditionnelles minées par une gestion sociale et économique catastrophique.
Néanmoins, cette victoire n’épargnera pas le parti de servir de « bouc émissaire » au lendemain d’un pathétique 16 mai. Le PJD s'est vu exclu des manifestations organisées en protestation contre le spectre du terrorisme qui planait à l'époque sur le ciel du royaume. Subissant les foudres des partis de gauche, l’accusant directement d’être l’instigateur de ces attentats terroristes, les islamistes du PJD capitulent…
Certains dirigeants de partis de gauche iront même jusqu’à demandé au gouvernement de geler l'activité du parti « des barbus modérés » prétextant que les sorties médiatiques, qui étaient parfois ratées, de certains de ses dirigeants, incitaient à la violence et menaçaient sérieusement le processus démocratique.
Face à cette campagne, la réaction des PJDéistes était des plus mâture. Laissant passer la tempête, ils ont réorganisé leurs rangs, renforcé leur présence sectorielle et surtout adouci leur prise de position.
Une stratégie bien réfléchie
La stratégie du PJD frappe par sa modestie. Ils prônent les vertus de l’intégrité et du dévouement sur la base des préceptes islamiques et disposent sur le terrain de relais associatifs et autres qui, depuis des années, portent la «bonne parole» dans le cadre d’un militantisme d’écoute et de proximité.
Il faut reconnaître que le PJD est une entité politique très bien organisée qui mène déjà depuis des années un travail de proximité et de manière très intelligente. C’est le parti qui a l’électorat sans doute le plus discipliné, c’est aussi celui qui va rallier les capacités de mobilisation les plus fortes. Enfin, il ne peut qu’être rehaussé du fait de l’éclatement du champ politique national, aggravé localement par la platitude des discours des autres partis et leur stagnation.
Islamistes modérés ?
Il est vrai que les déclarations de certains militants du PJD font « un peu peur » et présagent une vision « dangereuse » pour la société marocaine, déclarent les plus tolérants au PJD. Mais d’ajouter que ce n’est pas pour cela qu’on doit « trafiquer les élections pour contrecarrer la percée des islamistes ».
Une éventuelle victoire du PJD lors des prochaines élections est fort possible. La question qui se posera dès lors est la nature de la réaction du Makhzen face à un tel résultat. Acceptera-t-il le fait accompli et « normalisera » la position de ce parti dans l'échiquier politique marocain ou optera-t-il pour un remake du scénario algérien ? La seconde éventualité, à savoir l'annulation pure et simple des résultats des urnes, ne pourra qu'être fatale pour l'avenir du pays. Le cauchemar de nos voisins est encore présent dans les esprits.
Somme toute, la réussite d'une expérience gouvernementale menée par le PJD, permettrait l'ancrage d'une véritable tradition démocratique et solide concrétisant la tant souhaitée alternance au sein du gouvernement. Si c’est le cas, il est fort probable que nous aurons droit à un gouvernement islamiste qui ressemblerait à celui de la Turquie.
Boufous Youssef
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